D’aussi longtemps que je me souvienne, l’arrivée des véhicules chinois en Amérique du Nord est un sujet récurrent. Au moins une fois par année, les planches d’un salon de l’auto américain accueillent une marque chinoise qui, nous dit-on, devrait débarquer éminemment. Or, le fabricant d’autobus et de camions commerciaux chinois Skywell pourrait bien devenir le premier à vendre des véhicules automobiles entièrement chinois destinés aux consommateurs au Canada. Elle a lancé récemment son VUS ET5, dont la commercialisation est prévue au Canada d’ici quelques mois sous le nom d’Imperium SEV. Nous avons eu l’opportunité de tester un prototype pour constater de quoi il en retourne.
Comme la production de ce VUS tout nouveau ET5 est commencée depuis peu en Chine, et que celle destinée à l’Amérique du Nord n’a pas pris son envol, l’exemplaire que nous testons est un prototype assemblé à la fin de 2020, qui n’est pas exactement conforme aux normes de sécurité nord-américaines.
En termes de dimensions, l’Imperium SEV est plus proche d’un gros VUS compact comme un Volkswagen Tiguan que d’un VUS compact régulier comme un Toyota RAV4. C’est la même chose pour son empattement, plus proche d’un VUS intermédiaire comme un Toyota Highlander ou un Honda Passport que de celui d’un VUS compact.
En matière de style, il n’y a rien pour écrire à sa mère. La portion avant est munie de phares carrés et d’un panneau de calandre plein, alors que la portion inférieure est un peu plus fantaisiste avec ses bouches arrondies. De profil, on a presque affaire à un Buick Envision de précédente génération alors qu’à l’arrière une grande bande horizontale prend beaucoup de place. Bref, un design pour le moins anonyme, mais qui risque de bien passer à travers le temps.
Deux déclinaisons seront proposées : Comfort, vendue à 40 065 $ et la version Premium mieux équipée vendue 47 065 $, frais de transport et préparation inclus. Compte tenu de leur prix, elles sont toutes deux éligibles aux rabais gouvernementaux de 13 000 $ après taxes, abaissant le prix de base à 28 758 et le prix de la version Premium à 35 758 $, ce qui est alléchant pour un VUS compact électrique. C’est la version Premium que nous avons mise à l’essai.
Le premier coup d’œil est positif à bord du véhicule. Le tableau de bord rappelle, dans une certaine mesure, les lignes retrouvées à bord des produits Mercedes-Benz avec un écran central de 12.3 pouces haut perché, des appliques de bois et d’aluminium disposés en forme de vague et une instrumentation numérique.
L’ergonomie générale du véhicule est réussie. Les commandes sont à la bonne hauteur, l’instrumentation est facile à lire et la visibilité est libre de toute entrave. Les écrans offrent une qualité graphique intéressante et surtout une dimension très respectable (12,3 pouces pour l’écran central), mais impossible de vous parler de la convivialité de l’écran multimédia compte tenu qu’il était en chinois. Paradoxalement, l’instrumentation était en anglais et la déclinaison des menus s’est avérée difficile à comprendre.
Le confort des sièges est bon et les dégagements aussi, malgré la présence du toit ouvrant panoramique. Mais c’est réellement à l’arrière que l’empattement allongé paie; l’espace pour les jambes est carrément gigantesque. L’espace cargo est volumineux aussi, avec son aire plate et dégagée et une banquette rabattable d’une seule pièce – plutôt qu’une configuration 60/40 – est proposée pour agrandir l’espace cargo.
La question qui vous brûle les lèvres est sans doute en lien avec la qualité de construction. De prime abord, les matériaux semblent être de qualité et l’assemblage est serré, autant à l’avant qu’à l’arrière. En scrutant certaines parties moins exposées, j’ai toutefois découvert un assemblage relâché, mais je vous rappelle qu’il s’agit d’un prototype.
Malgré la configuration VUS, l’Imperium SEV se rapproche plutôt d’une voiture en termes de motorisation. Il n’est disponible qu’avec un moteur à aimant permanent de 204 chevaux positionné à l’avant, en faisant un véhicule à traction. Aucune autre motorisation n’est proposée.
Deux capacités de batteries sont proposées en fonction de la déclinaison. La première, qui équipe la déclinaison Comfort, est d’une capacité de 55 kilowattheures, ce qui donne une autonomie de 410 km calculée avec le très optimiste cycle NEDC. La déclinaison Premium testée est munie d’une batterie de 72 kilowattheures bonne pour une autonomie NEDC de 520 km. Elles sont toutes deux munies d’un système de gestion thermique au liquide. En matière de recharge, le chargeur embarqué est de 6,6 kilowatts et la puissance maximale de recharge sur borne CCS-Combo de niveau 3 atteint de 60 kilowatts, allouant une recharge de 20 à 80 % en 35 minutes selon les dires du constructeur. Toutes ces données techniques se rapprochent de ce que propose actuellement, par exemple, un Hyundai Kona Electric.
La conduite de l’Imperium SEV n’a rien de réellement différent d’un véhicule électrique d’une marque connue. La puissance du moteur électrique est linéaire et suffisante pour la circulation en ville et sur la route, et le silence de roulement est très bon. Les suspensions avant et arrière sont relativement fermes en raison du poids du véhicule, mais permettent en revanche d’assurer une bonne tenue de route. Comme la majorité des véhicules électriques à traction, une accélération franche déclenchera un effet de couple prononcé, mais rien n’y paraît en conduite normale.
À basse vitesse, la direction est carrément trop assistée, laissant l’impression de n’avoir rien dans les mains. À haute vitesse, elle tend vers l’autre extrême avec une résistance marquée plutôt inattendue. Aussi, les freins manquent de linéarité; le passage du freinage régénératif au freinage réel provoque une conduite saccadée. Ces deux aspects m’ont laissé une impression de manque de raffinement, comme si beaucoup d’efforts avaient été mis sur l’apparence et l’équipement, mais moins sur les sensations de conduite. Espérons que ce sera corrigé.
Si l’autonomie annoncée de 510 kilomètres est carrément trop optimiste, mon essai m’a permis de constater qu’on pourra espérer une autonomie d’environ 400 km dans les meilleures conditions, ce qui est concurrentiel avec d’autres modèles plus petits – comme le Chevrolet Bolt EUV ou le Hyundai Kona Electric – actuellement disponibles sur le marché.
De prime abord, l’Imperium SEV renferme des caractéristiques qui répondent aux critères des consommateurs actuels : un bon format, un bel intérieur, de l’équipement, une motorisation électrique et un prix alléchant en tenant compte des rabais.
Cette marque à néanmoins beaucoup de choses à prouver. Quelle sera la fiabilité et la durabilité du produit? L’assemblage de ce qui ne paraît pas est-il à la hauteur? Quelle sera la qualité du réseau de distribution - dont deux concessionnaires sont confirmés à Laval et à Québec - et de quelle manière supportera-t-il les clients? Beaucoup d’inconnu demeure et c’est la raison principale pour laquelle nous recommandons la prudence, et surtout la patience. Regardons cette marque arriver sur le marché avant d’acheter; nous vous en reparlerons très certainement.