Napa, Californie – Le nom Aviator vous dit quelque chose? Vous n’avez pas la berlue, le modèle est apparu chez Lincoln au début des années 2000, mais sa commercialisation a duré à peine quatre ans, faute de succès.
On lui reprochait d’ailleurs de n’être, en fait, qu’un Ford Explorer endimanché. Ce n’était pas nécessairement faux, les deux véhicules ayant beaucoup en commun. On a eu la chance de prendre le volant du nouvel Aviator, dans sa version à essence et hybride rechargeable!
Avec le retour de l’Aviator pour 2020, les ingénieurs ont voulu s’assurer de ne pas répéter les mêmes erreurs. Le VUS devient le second modèle le plus huppé et le plus dispendieux des utilitaires Lincoln, tout juste en dessous du Navigator. D’ailleurs, on peut qualifier l’Aviator de bébé Navigator; il reprend plusieurs éléments de style tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, tellement, qu’on se demande s’il ne va pas cannibaliser des ventes.
Grâce à trois rangées de sièges, l’Aviator peut accueillir jusqu’à sept passagers. Il rivalise donc avec des modèles tels l’Acura MDX, l’Infiniti QX60 et le Lexus RX. On peut également ajouter le Audi Q7 et le BMW X7, mais il y a fort à parier que peu d’acheteurs du trio germanique se laisseront séduire par un produit Lincoln, surtout que la marque tente toujours de raviver son niveau de prestige. Et c’est une cible très difficile à atteindre parmi la concurrence allemande.
Notre premier contact avec l’Aviator 2020 a révélé un véhicule rempli de technologies novatrices incluant le système Phone as a Key, qui permet de pratiquement tout contrôler dans le véhicule à partir de son téléphone intelligent – même de le démarrer. S’y trouve également un régulateur de vitesse intelligent, dont on vous a parlé récemment, qui se conforme aux limites imposées.
Côté style, qualité de finition et niveau de luxe, le véhicule n’est pas en reste par rapport à ses rivaux. L’Aviator 2020 gagne à être connu, mais encore faudra-t-il avoir l’idée de se déplacer chez Lincoln lorsque viendra le temps de magasiner votre prochain VUS de luxe.
Dans l’apparence du nouvel Aviator, rien de très extraverti, surtout quand on observe le choix de couleurs de carrosserie. Et on l’associe rapidement à la marque en raison de sa grille avant typique des véhicules Lincoln, alors que son échappement quadruple ainsi que ses immenses roues sont les principaux éléments responsables d’un certain dynamisme. Les prises d’air latérales ne vous rappellent-elles pas certains modèles Range Rover?
Dès qu’on prend place à bord, on découvre un habitacle qui dégage le luxe et qui a tout pour impressionner. Le choix des garnitures et des cuirs y est pour beaucoup, tout comme la présentation moderne et distinguée qui n’est pas sans nous rappeler celle du Navigator. Le tableau de bord demeure assez sobre, et le nombre de commandes est restreint au maximum afin d’éviter qu’il ne soit surchargé, comme c’était le cas dans le passé.
La majeure partie des fonctions est regroupée à l’intérieur du système d’infodivertissement SYNC 3 et de son écran tactile haute définition de 10,1 pouces, posé en plein centre du tableau de bord. Un peu plus bas, il ne reste que quelques commandes classiques pour le climatiseur et la radio. On s’acclimate rapidement à l’utilisation de l’ensemble. Le système SYNC a certes connu des ratées de jeunesse, mais il demeure maintenant l’un des plus efficaces. Étonnamment, bien que l’Aviator s’adresse aux familles bien nanties, il n’offre pas pour le moment de système de divertissement pour passagers arrière.
Le nerf de la guerre dans les VUS à sept passagers, c’est l’espace, tant pour les occupants que le chargement. Avec son gabarit supérieur aux principaux concurrents – en largeur et en longueur –, l’Aviator dispose d’un avantage, surtout quant à l’espace alloué aux jambes à l’arrière. Le véhicule conserve également un excellent volume de chargement, même une fois toutes les banquettes utilisées.
Offert à un prix de base de 69 000 $, l’Aviator n’est pas une aubaine par rapport à ses rivaux, mais dispose d’une liste d’équipements de série bien fournie. Et le fabricant a décidé de ne pas trop vous extorquer avec des options aussi nombreuses qu’onéreuses, comme c’est souvent le cas chez ses homologues allemands.
Deux versions son offertes. Celle de base profite du même moteur qui équipe les Ford Explorer ST et Lincoln Continental – oui oui, il existe encore –, soit un V6 de 3,0 litres biturbo qui développe une puissance de 400 chevaux et un couple de 415 lb-pi. C’est une puissance supérieure, et de loin, aux mécaniques de base de ses rivaux, surtout si on le compare à ceux équipés d’un quatre-cylindres suralimenté. Sa transmission à dix rapports est aussi bien connue, elle qui se trouve dans plusieurs autres modèles Ford.
Le rouage intégral est de série, et c’est une bonne chose vu le prix auquel on nous vend le véhicule. Le système favorise les roues arrière en conduite normale et peut transférer du couple aux roues avant en cas de besoin, ce qui permet de privilégier les performances.
La version qui suscitera le plus d’intérêt, c’est l’hybride rechargeable étonnement baptisé « Grand Touring » et non pas « PHEV ». Pourquoi? Lincoln ne prétend pas nécessairement attirer les amateurs de conduite électrique et a davantage déployé cette motorisation pour rehausser les performances du modèle, d’où son appellation distincte. On y retrouve le même six-cylindres que dans la version de base, mais un moteur électrique est ajouté, pris « en sandwich » entre le moteur et la transmission. Les chiffres parlent d’eux même : l’ensemble déploie un impressionnant 494 chevaux, mais c’est surtout le couple de 630 lb-pi qui met la table pour une expérience plus palpitante.
On nous a tout d’abord donné les clés de la version à essence, Lincoln voulant certainement nous laisser conclure la journée avec le plus performant des modèles. Vous connaissez l’adage… ne jamais se produire après meilleur que soi. En général, l’Aviator est beaucoup plus axé sur le grand confort sur route que sur le dynamisme. Il est étonnant d’ailleurs que le Audi Q7 soit visé, rien à voir côté comportement. L’Aviator est un grand routier plutôt qu’un VUS sportif. On ne se sent pas réellement connecté à la route avec une direction et une suspension très aseptisées. Même le mode de conduite Excite – Lincoln s’est creusé la tête pour ne pas simplement employer « Sport » – ne réussit pas à animer le véhicule selon nos attentes. L’insonorisation est toutefois excellente; on n’entend pratiquement aucun bruit extérieur, et ce, même à plus grande vitesse.
Le silence de roulement est encore plus marqué si vous optez pour la suspension adaptative et pneumatique Air Glide qui comporte une caméra avant pouvant détecter les variations dans la chaussée afin de préconditionner la suspension. C’est d’un confort extrême et c’est ici que l’Aviator trouve ses principaux arguments, le tout demeurant fidèle à ce que Lincoln nous a habitués.
Quant à la livrée hybride, la puissance et le couple disponibles à très bas régime transforment le véhicule en une bête d’autoroute capable de vous faire traverser la province sans mal de dos, et avec l’assurance de pouvoir doubler pratiquement tout ce qui se trouve devant vous. Le modèle ajoute deux modes de conduite, soit Pur EV et Preserve EV. Le premier maximise la conduite en mode électrique – vous pourrez parcourir environ 30 km avant de vider la batterie de 13,6 kWh. Vous avez raison, ce n’est pas énorme, surtout en hiver quand le froid fait fondre l’autonomie de la batterie à vue d’œil. Quant au second mode, il permet de conserver l’autonomie disponible pour une utilisation ultérieure ou de recharger l’ensemble jusqu’à environ 75 % en utilisant l’énergie du moteur à essence.
En conduite, la puissance supplémentaire se fait apprécier. Il suffit d’enfoncer l’accélérateur pour se retrouver cloué au siège, non pas sans avoir vu l’avant du véhicule se soulever, preuve de la mollesse de la suspension. À la vue d’un arrêt, on s’aperçoit rapidement que la régénération n’est pas très agressive. On aimerait plus d’options à ce chapitre, mais ce n’est malheureusement pas le cas. Impossible de conduire sans utiliser le frein comme c’est normalement le cas des véhicules Plug-in Hybrid.
Le seul véritable désavantage de la version hybride? Une capacité de remorquage légèrement amputée (5 600 lb au lieu de 6 700 lb) en raison de son indice de masse corporel plus élevé. Il faudra aussi dépenser 12 000 $ de plus par rapport à la version à essence, et cela exclut tout équipement supplémentaire.
L’Aviator nous a séduits par son grand confort sur la route ainsi que par son niveau de luxe. Le modèle prétend à un certain dynamisme, mais ce n’est pas le cas. Il s’apparente beaucoup plus à ce qu’Infiniti et Acura nous offrent en termes de comportement routier, en plus confortable même.
On peut affirmer que les ingénieurs ont réussi cette fois à le distinguer assez de l’Explorer pour que le supplément exigé par rapport à ce dernier ne nous semble pas injustifié. L’Aviator aura fort à faire pour se démarquer dans ce marché, déjà saturé de joueurs intéressants et de renommée. Toutefois, il y a fort à parier que ses propriétaires ne seront pas déçus!