Pour le commun des mortels, le monde des supervoitures est parfois difficile à comprendre. Mais pour le client ciblé, les subtiles dissemblances que présentent différents modèles font un monde de différence. La McLaren GT 2020 paraît certes comme étant une autre bagnole exotique ultrapuissante vendue à un prix démesuré, mais elle répond en réalité à un besoin très précis que seule sa clientèle peut comprendre.
Tentez pour quelques minutes de vous mettre dans la peau d’un client de McLaren. Il est sans doute déjà propriétaire d’autres bolides d’exception, et il en a probablement assez de se faire brasser au volant de sa McLaren 720S. Il demande donc à son vendeur de lui trouver une superbombe un peu plus confortable et spacieuse afin que lui et sa conjointe puissent partir en balade vers le chalet le week-end venu. Il cherche donc les performances de sa 720S et le confort de sa Bentley. Croyez-le ou non, ce genre de demande est beaucoup plus fréquent qu’on ne pourrait le croire, même au Québec.
Ainsi est née la McLaren GT 2020, la première voiture du type « grand tourisme » du constructeur, ou si vous préférez, la première supervoiture à harmoniser le confort d’une grande routière avec les performances ahurissantes d’une sportive exotique.
Même à un prix de départ de 250 000 $ avant les options, la GT s’affiche comme l’un des modèles les plus accessibles de la marque. Elle se situe donc dans les mêmes barèmes de prix que les 540C, 570S et 570S Spider; des bolides d’entrée de gamme chez McLaren. Ce prix est également comparable à la plus récente Ferrari Roma qui vise, elle aussi, à offrir une conduite un peu plus décontractée à son pilote. Le prix de notre modèle d’essai s’élevait à 300 750 $, rien de moins.
Afin d’être un peu plus discrète, cette McLaren affiche un design nettement plus sobre, mais tout de même sportif, lui permettant de conserver les proportions d’une supervoiture à moteur central. Personnellement, je la trouve très belle, surtout quand je l’examine depuis le pilier C. La McLaren GT est large, trapue, longue et profilée. Les ressemblances avec la Chevrolet Corvette 2020 sont toutefois un peu trop apparentes !
L’accès à bord d’une supervoiture se révèle presque toujours compliqué, en raison de sa basse garde au sol, d’une part et de ses énormes bas de caisse, d’autre part.
Il est clairement plus aisé de monter dans une McLaren GT que dans tout autre supervoiture. On a l’impression de plonger dans habitacle d’une voiture sport de luxe plutôt que de tomber à l’intérieur d’un bac en fibre de carbone. Bon, on est loin de la berline ou, encore, du VUS, car ça demeure un cockpit clos. Mais on remarque néanmoins les efforts du constructeur pour rendre l’expérience plus conviviale.
Une fois bien assis dans ses sièges de course, la McLaren GT nous enveloppe rapidement dans l’univers des voitures de très haute performance. On est assis bas, la voiture est large et le long pare-brise incliné octroie une visibilité exceptionnelle, ajoutant une sensation de contrôle immédiat.
Derrière moi, j’apercevais déjà la raison d’être de la bête. Certes, son moteur est placé au centre arrière du châssis, mais contrairement aux autres supervoitures de même configuration, la GT dispose d’un énorme coffre vitré, placé au-dessus du compartiment-moteur où on peut y loger jusqu’à 437 litres de marchandise. C’est du jamais vu pour ce genre de véhicule. À titre de référence, le volume de son coffre est identique à celui d’une Toyota Camry, sans compter le petit compartiment logé à l’avant qui ajoute un autre 140 litres d’espace. Ce long coffre vitré laisse également place à une bonne visibilité vers l’arrière.
Là où la GT m’a déçu, ce n’est pas par le confort de ses sièges, ni par sa qualité de finition remarquable. Elle domine à ce chapitre. Son plus grand défaut réside dans l’ergonomie générale de ses commandes. Par exemple, le réglage des sièges ne s’effectue pas du côté gauche comme dans la plupart des voitures, mais plutôt à droite, entre le siège du conducteur et la console centrale. L’espace est exigu, et ce n’est pas convivial.
L’interface multimédia, bien que jolie au premier coup d’œil, est également un désastre d’ergonomie. On n’y comprend rien, les menus sont complexes, et l’information n’est pas très claire. Elle est donc plus distrayante qu’utile.
Enfin, comme toute bonne supervoiture, la McLaren GT est équipée de modes de conduite, permettant au conducteur de personnaliser son comportement routier et ses performances à sa guise. Mais l’activation de ces modes est tout aussi fâcheusement complexe que le système multimédia. On doit d’abord activer la commande « Active » afin de pouvoir passer d’un mode à l’autre. Étant donné que cette fonction se réinitialise dès qu’on arrête l’auto, il faut s’en souvenir si on désire rejouer avec les modes. C’est inutilement complexe.
Depuis quelques années, McLaren performe nez à nez, surpassant parfois même des marques comme Ferrari, Lamborghini et Porsche sur le plan de la performance. Là où McLaren domine sur ses adversaires, c’est dans la technologie qu’elle injecte dans ses moteurs thermiques. Une présence marquée en formule 1 depuis des décennies octroie à McLaren un savoir-faire technique extraordinaire.
Or, cette GT est sans surprise mue par un bijou de moteur. Installé confortablement derrière le cockpit, le V8 biturbo de 4,0 litres développe une puissance de 612 chevaux et produit un couple de 465 livres-pieds.
Jumelé à une boîte de vitesses automatique à double embrayage à 7 rapports qui achemine la puissance vers le train arrière, et attaché au châssis au moyen de supports de moteur spécialement conçus pour atténuer les vibrations, ce chef-d’œuvre mécanique, capable de révolutionner jusqu’à 7 500 tours/minute, permet à la GT d’accomplir le sprint de 0 à 100 kilomètres/heure en quelque 3,0 secondes. Le quart-de-mille s’effectue en 10,8 secondes, et la vitesse de pointe est chiffrée à 326 kilomètres/heure. Une bombe.
En termes de suspension, la GT utilise toutefois la configuration un peu plus rudimentaire de la 570S, c'est-à-dire qu’elle n’est pas équipée du système ProActive Chassis Control II de la 720S. Cette configuration permet aux ingénieurs d’assouplir les ressorts afin de rendre la GT un peu plus confortable en conduite urbaine, tout en conservant intacts les réflexes et l’agilité d’une sportive.
Sur le mode Comfort, la McLaren GT est tout aussi facile à endurer au quotidien qu’une Golf GTI. C’est d’ailleurs plutôt remarquable à quel point cette superbombe peut être docile, douce et silencieuse. Et merci à la technologie Nose Lift qui permet de soulever le nez de l’auto afin d’éviter d’érafler le museau dès la première entrée de cours venue !
En conduite décontractée, la GT nous enveloppe dans un confort et une qualité d’assemblage hors pair, à un point où on oublie rapidement qu’on est au volant d’une bête de plus de 600 chevaux. Ce sont les gens qui l’entourent qui vous le rappellent avec leurs regards perçants, sourires, pouces vers le haut, et téléphones braqués vers vous.
Les modes Sport et Track permettent toutefois de révéler l’autre personnalité du bolide. Dans ces modes, les accélérations que procurent la McLaren GT sont violentes, rien de moins. L’accélération brutale est une chose, mais c’est la précision de sa direction, harmonisée avec une calibration de suspension impeccable qui rend l’expérience d’autant plus spectaculaire. Sans surprise, le passage des rapports se fait en un temps éclair, accompagné de pétarades agréables en rétrogradation.
J’ai particulièrement apprécié le volant dépourvu de boutons ainsi que les leviers de sélection de vitesses positionnées à même la colonne de direction, permettant de mieux les saisir en conduite sportive.
Dans la GT, on a carrément l’impression de conduire un énorme « go-kart » en raison de la sensation d’être assis sur le devant de l’auto, et le puissant moteur V8 qui hurle derrière nous. C’est euphorique, mais aussi tellement confortable, qu’on doit féliciter le constructeur d’avoir conçu une supervoiture aussi bien adaptée à la vie de tous les jours.
Pour en revenir à la sonorité du moteur, j’ai été un peu déçu par sa tonalité peu enivrante. Si on le compare à ce qui se fait du côté des Italiens, ce n’est aucunement charmant. Bien que ce moteur produise efficacement sa puissance, tout en affichant une consommation moyenne de carburant assez remarquable de 10,6 litres/100 kilomètres (en conduite décontractée), il est carrément absent de personnalité. Il fait du bruit, c’est tout.
Alors, recommandons-nous l’achat d’une McLaren GT 2020 ? Honnêtement, ce n’est pas facile de recommander une bagnole qui n’est réservée qu’à 1 % de la population.
Dans la mesure où vous faites partie de cette classe sociale, sachez que oui, McLaren a réussi à offrir une supervoiture plus docile, confortable et polyvalente que la moyenne des bolides du genre. Mais ne vous attendez pas au même degré de confort et de luxe qu’une Bentley Continental GT ou encore d’une Porsche Panamera. Car après plusieurs heures derrière le volant, on cherche à sortir de son habitacle clos pour prendre une bouchée d’air frais tellement l’expérience est intense.
Si ce sont les performances de haut calibre qui vous allument, sans que tout le monde du quartier ne sorte de chez lui pour vous prendre en photo, la McLaren GT demeure une supervoiture élégante, discrète et étonnamment polyvalente, une automobile hyper technologique qui vous procurera une sensation de conduite inégalée, tout en redéfinissant vos attentes d’une exotique.