Une fois qu’on sait qu’il y a une alternative plus intéressante, on a toujours l’impression que tout ne va pas assez vite pour assurer le changement. C’est un peu la sensation qu’on a avec l’électrification des transports. Il y a des voitures électriques. Alors, pourquoi les consommateurs ne les achètent-ils pas immédiatement ? La solution est simple, non ? L’équipe de RPM se penche sur les raisons qui expliquent la réticence des consommateurs face aux véhicules tout électriques.
Pierre Michaud
Il n’y a pas vraiment de réticence. Il y a certainement une mauvaise connaissance du produit ainsi que de ses capacités réelles. Le prix n’est qu’un argument et non pas un réel frein à l’achat d’un véhicule électrique.
Pour soutenir ce que j’avance, vous n’avez qu’à aller sur le web magasiner le prix des voitures et des camionnettes tout à fait conventionnels et vous constaterez que le moindre écart de conduite dans le choix des options vous entraîne allègrement au-delà des 50 000 $ ! Il est vrai que les modèles offerts sont limités, et que leur équivalent peut proposer un prix de détail plus bas, mais si vous faites bien vos calculs, à long terme (6 ans au moins) vous y gagniez au change.
Cependant, ce qui me choque le plus, c’est de constater que la motivation des consommateurs à se procurer une voiture électrifiée n’est pas de préserver notre environnement, mais plutôt d’aller dans le sens de la mode ! Ce n’est pas nouveau ! Ç’a toujours été comme cela ! On le voit avec la camionnette pleine grandeur ou avec les VUS. Dis-moi ce que tu conduis et je te dirai qui tu es ! Plus les consommateurs verront de voitures électriques sur la route et plus ils en achèteront, c’est aussi simple que ça !
Luc-Olivier Chamberland
Il faut se le dire, les avantages sont nombreux, mais les voitures électriques ne sont pas données et ne conviennent pas à tous les budgets. Les gouvernements ont beau nous donner des rabais, il n’en demeure pas moins qu’aucune voiture électrique ne passe le plancher des 30 000 $. Pour plusieurs, la voilà l’explication de la réticence. Certains diront que l’occasion est une possibilité. C’est vrai, mais il n’y a pas encore une panoplie de véhicules offerts, et, surtout, ce n’est pas tout le monde qui désire une voiture de seconde main.
Un autre aspect que je considère majeur : les possibilités de configurations. Pour le moment, on voit quelques voitures compactes, une ou deux berlines et deux ou trois VUS. On sait que plusieurs camionnettes, d’autres VUS, différentes capacités et ainsi de suite seront éventuellement offerts ; mais quand et, encore une fois, à quel prix ? Un exemple probant : quelles sont les possibilités en ce moment pour une famille qui a besoin de remorquage pour faire du camping ? À l’exception du Tesla Model X à partir de 125 000 $ il n’y a pas de choix. Ça nous ramène à mon premier point, le budget.
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L’autre grand défi est géographique. Il y a bien les Tesla qui offrent plus de 500 kilomètres d’autonomie, mais, pour la plupart des autres, on est passablement plus bas, plus près des 300 à 350 kilomètres. Il est vrai que la très grande majorité des automobilistes n’ont pas besoin de plus de 60 kilomètres par jour, mais la barrière psychologique du Montréal-Québec aller-retour n’est pas atteinte.
On dit souvent que les voitures électriques sont conçues pour les personnes qui vivent en zone urbaine. Et si c’était plutôt pour les banlieusards ? En ville, ce ne sont pas toutes les tours à condos qui acceptent les bornes de recharge. Une personne qui vit dans Hochelaga-Maisonneuve où elle ne peut stationner sa voiture que dans la rue, aura aussi de la difficulté à recharger sa batterie tout en ayant un œil dessus.
Nous pouvons avoir des réticences et chercher toutes les raisons du monde, l’électrification de l’automobile est inévitable et se produira, qu’on le veule ou pas. Les véhicules électriques continueront d’évoluer pour répondre de plus en plus au plus grand nombre de consommateurs. Comme d’habitude, nous devons être patients.
Samuel Lessard
Encore aujourd’hui, beaucoup de gens entretiennent des mythes qui nuisent à la popularité du véhicule électrique. On qualifie son autonomie de trop limitée, sa capacité de recharge de trop lente, son système de chauffage d’inefficace et sa fiabilité d’aléatoire. Même le remplacement des batteries est encore un sujet chaud auprès de certains détracteurs.
Or, quand on s’arrête et qu’on étudie froidement tous les aspects précédents, on constate qu’il n’y a plus réellement lieu de s’inquiéter, et que la grande majorité des gens peuvent se déplacer quotidiennement sans embûches avec un véhicule électrique.
Quand on a pigé le premier aspect, il y en a un autre qui se pointe : la disponibilité des modèles. Comment voulez-vous convaincre quelqu’un qui cherche un VUS compact à rouage intégral comme un Honda CR-V d’opter plutôt pour un Kia Soul EV à traction, faute d’options comparables ? Alors que les VUS sont très en vogue, très peu sont offerts avec une motorisation électrique et un rouage intégral.
Finalement, les gens sont rebutés par le coût d’acquisition plus élevé, ce qui fait que sans la présence de rabais gouvernementaux, les véhicules électriques demeurent presque invendus.
Tout ça pour dire qu’il y a place à amélioration — et ça s’en vient — autant auprès des consommateurs que des constructeurs. Les consommateurs doivent outrepasser leurs craintes à l’égard des véhicules électriques, et les constructeurs doivent diversifier l’offre et veiller à réduire les prix à l’achat. Ce sont des conditions sine qua non à l’atteinte de l’objectif du Plan Vert du gouvernement du Québec.
Sylvain Raymond
Tout changement important dans les habitudes des gens apporte des réticences. Il en va de même pour les véhicules électriques. Il faudra simplement du temps pour arriver à une adoption plus généralisée. Il demeure plusieurs enjeux importants à régler afin de démocratiser un peu plus les véhicules électriques. Ça passe par une plus grande variété des modèles, la disponibilité et un inventaire suffisant et, surtout, des gammes de modèles plus abordables et accessibles à l’ensemble des consommateurs.
Beaucoup de mythes concernant la voiture électrique commencent à être brisés, et l’autonomie grandissante des modèles offerts contribue à enrayer l’un des principaux enjeux. Le stress de l’autonomie qui affligeait les premiers modèles est de plus en plus inexistant, surtout que le réseau de recharge est beaucoup plus complet de nos jours. Les gens sont aussi mieux informés, même s’il demeure encore plusieurs faussetés concernant les véhicules électriques.
Toutefois, pour avoir aidé plusieurs personnes dans le magasinage d’un modèle électrique, l’aspect financier semble souvent freiner les ardeurs de plusieurs intéressés. Il demeure peu de vendus sous la barre des 50 000 $ et, bien souvent, un taux d’intérêt défavorable sur les véhicules électriques vient miner l’économie qu’on peut réaliser en frais de carburant.
Il me tarde de voir un constructeur offrir un véhicule électrique intéressant proche des 30 000 $, plusieurs acheteurs se laisseraient convaincre assez rapidement.
William Clavey
À mon avis, il y a deux éléments clés qui contribuent aux réticences des consommateurs de passer à l’électrique : le prix et le temps de recharge.
Certes, il est vrai qu’en achetant une voiture électrique, on installe habituellement une borne pour charger la batterie à la maison. Et avec la quantité industrielle de bornes publiques qu’offre actuellement le Circuit électrique du Québec, il est devenu facile de se ravitailler sur la route.
Mais le délai de la recharge demeure problématique dans un monde où tout va très vite et où les consommateurs ont l’habitude de remplir un réservoir de carburant en quelques minutes.
Or, aux yeux des consommateurs, la commodité qu’offre le carburant surpasse ses frais d’utilisation et la pollution qu’elle génère. Pour plusieurs, dont la vie est déjà très chargée en responsabilités, le fait de devoir trouver une borne de recharge et ensuite d’attendre au moins 20 minutes avant de reprendre la route est carrément impensable.
Cela dit, plus les batteries des véhicules électriques évolueront, plus l’autonomie sera élevée, et moins ce facteur sera problématique. Mais seulement si le prix baisse. Car même si l’auto électrique devient soudainement le mode de transport parfait, elle demeurera marginale si elle ne parvient pas à être abordable. Au moment d’écrire ces lignes, l’industrie de la voiture électrique dépend grandement des incitatifs gouvernementaux pour survivre. Et même après les rabais applicables, un véhicule électrique revient nettement plus coûteux à l’achat qu’un véhicule à carburant. Même si l’on économise ensuite sur le carburant et sur les frais d’entretien, ça prendra tout de même quelques années pour recouvrer son investissement.
Considérant le fait que le noyau de la population québécoise achète des véhicules neufs se situant entre 25 000 et 40 000 $, les voitures électriques, dont le prix de départ oscille aux environs des 50 000 $ (avant les rabais applicables) forcent les consommateurs à y penser à deux fois avant d’acheter.
Ajoutez à cela des taux d’intérêt aucunement alléchants (pour la plupart), et il est évident que la voiture électrique, malgré ses nombreux avantages, n’est pas encore à la portée de tout le monde.
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