Il y a déjà un peu plus d’un an, je me trouvais au Vietnam pour conduire le VF 8, un VUS électrique construit par VinFast, le premier constructeur d’automobiles vietnamien de l’histoire qui, il y a 5 ans à peine, n’existait même pas.
Ensuite sont venues les promesses d’un véhicule qui serait commercialisé sur notre marché en septembre 2022 avec un principe controversé d’abonnements à la batterie, le tout supporté par l’objectif de construire une toute nouvelle usine de montage en Caroline du Nord. Bref, ça promettait.
Et soudain, tout semblait s’écrouler chez VinFast. La commercialisation du VF 8 avait d’abord été repoussée à décembre 2022, date à laquelle on nous annonçait d’autres délais. Le constructeur a ensuite éprouvé de la difficulté à homologuer le véhicule pour notre marché et, plus récemment, nous apprenions que VinFast mettait à pied plus de 80 employés en Amérique du Nord. La cerise sur le gâteau? Le président de de VinGroup, Pham Nhat Vuon, annonçait ne plus vouloir débourser de sa fortune personnelle dans VinFast.
Je me demandais donc si VinFast allait mourir dans l’œuf. Contre tout attente, me voici en Californie en train de conduire un modèle de production dont la commercialisation serait prévue chez nous au mois de juin.
Observer et apprendre
En fait, ce que j’ai immédiatement constaté en m’approchant du VF 8, c’est que VinFast semble avoir passé la dernière année à étudier et à comprendre le marché de l’automobile nord-américain. Au moment même où j’observais une nette amélioration en termes de qualité de construction et de peinture de mon exemplaire, les relationnistes du constructeur m’informaient que le programme d’abonnements à la batterie a été abandonné au Canada.
- À LIRE : Le constructeur vietnamien de véhicules électriques VinFast coupe des emplois en Amérique du Nord
- À LIRE : VinFast laisse tomber pour le moment la location de batteries au Canada
Ensuite, on me disait que le véhicule serait couvert par une garantie béton, soit de 10 ans/200 000 kilomètres et 10 ans kilométrage illimité pour la batterie, tout en offrant de la remplacer si elle démontre des signes de dégradation sous les 70 %.

Peint en vert Deep Ocean, mon VF 8 rayonnait fièrement sous le soleil californien. À mon avis, son design, concocté par nul autre que la célèbre firme italienne Pininfarina, est réussi. Environ de la même taille qu’un Nissan Ariya ou un Volkswagen ID.4, le VF 8 semble moderne, mature et, surtout, différent de tout ce qui circule sur nos routes. On le reconnaît instantanément par sa signature à DEL illuminée en forme de V sur la calandre. C’est de bon goût.
On achète un VinFast comme on achète une Tesla ou une Polestar, c'est-à-dire directement depuis le site internet du constructeur ou dans une boutique située à l’intérieur du Carrefour Laval. Le véhicule est ensuite livré à votre domicile.
Sur notre marché, deux versions sont proposées, Eco et Plus comme mon modèle d’essai. Le constructeur dit vouloir prioriser l’Eco au moment de son arrivée, lequel se détaille à un prix de départ de 53 600 $ avant options. Encore aucun prix canadien n’a été confirmé pour le Plus. VinFast confirme cependant que toutes les déclinaisons du VF 8 seront admissibles au 12 000 $ de rabais gouvernementaux totaux pour les véhicules électriques.

Étonnamment bien construit, spacieux et confortable
L’accès à bord d’un VF 8 s’effectue facilement grâce à une grande ouverture des portières. Le siège du conducteur, réglable en plusieurs manières, s’est montré confortable. Je déplore toutefois une visibilité réduite par la lunette en raison du fait qu’elle semble être inclinée vers le bas.
À ma grande surprise, le VF 8 fait preuve d’une qualité de construction plus qu’acceptable, sans toutefois révolutionner le segment. Tout est bien assemblé, et on sent que le véhicule est solide quand on manipule les éléments de finition. Les matériaux utilisés font toutefois parfois bon marché, mais en général, le VF 8 se débrouille très bien à ce chapitre.

Comme dans les produits Tesla, on opère ce véhicule par l’entremise d’un écran de 15,6 pouces installé au centre de la planche de bord. Tout est réglable de cette manière, y compris le volant et les rétroviseurs. À mon avis, ces commandes auraient mérité des boutons physiques. Cela étant dit, cette interface m’a agréablement surpris pas sa vitesse d’exécution, la convivialité de ses commandes et sa belle qualité graphique. Honnêtement, j’ai vu pire chez certains constructeurs établis.
À l’arrière, le VF 8 est très spacieux, au point où une grande personne y trouve facilement confort grâce à un grand dégagement pour les jambes et la tête. Cet espace ne se reproduit toutefois pas dans le coffre où le VF 8 ne peut loger que 1 373 litres de marchandise quand le dossier des sièges est replié, c’est peu par rapport au segment. Heureusement, le coffre avant (frunk) permet d’ajouter 78 litres.

Des données techniques conservatrices
Une seule batterie au lithium-ion refroidie par liquide d’une capacité utilisable de 87,7 kilowattheures alimente toute la gamme du VF 8. De série, le véhicule est équipé des quatre roues motrices par l’entremise de 2 moteurs électriques, dont un installé sur chaque train.
Dans sa version Eco, ce VUS développe une puissance totale combinée de 348 chevaux et produit un couple de 368 livres-pieds. Son autonomie est chiffrée, selon les évaluations de l’EPA, à 425 kilomètres. Pour ce qui est du Plus, on promet 402 chevaux, 457 livres-pieds et une autonomie de 391 kilomètres.
Tous les VF 8 peuvent atteindre une puissance de recharge de 160 kilowatts dans une borne rapide compatible, tandis que le chargeur embarqué pour la borne de niveau 2 à la maison atteint 7,7 kilowatts. En effet, ces données techniques sont très conservatrices et ne bouleversent aucunement le segment.

Accent sur le confort et le raffinement
Mon parcours s’est déroulé sur une distance d’environ 100 kilomètres en banlieue de San Diego. Dès le début de mon aventure, j’en suis venu à l’évidence que les vocations premières du VF 8 sont le confort et la douceur de roulement. Malgré des accélérations franches — attendues d’un véhicule électrique — ce VUS n’est pas très rapide, même sur le mode Sport. Toutes tentatives de le conduire sportivement dans les virages m’ont rapidement découragé de le faire. Bref, c’est loin d’être un athlète!
Ce qui m’a toutefois plu, c’est la douceur de ce véhicule et, surtout, l’insonorisation de son habitacle. Le VF 8 fait preuve d’un comportement routier mature et raffiné au point où l’on se sent rapidement décontracté derrière son volant.

Parlant de volant, celui-ci nécessitera assurément une recalibration, car il s’est révélé beaucoup trop assisté à mon goût. En fait, ses sensations étaient inconstantes. Parfois le volant réagissait rapidement, parfois lentement, ce qui créait une sensation de déconnexion avec le véhicule.
J’ai également été déçu par l’absence de la conduite à une pédale. Certes, le VF 8 propose le freinage régénératif, réglable en deux modes, mais il est très vaguement ressenti durant la conduite.
Enfin, la consommation d’énergie de ce véhicule ne s’est pas montrée très épatante durant mon essai. À la fin de mon périple, l’ordinateur de bord affichait une consommation 25 kWh/100 km. Ça se traduit par une autonomie théorique de 350 kilomètres. C’est bas si l’on compare le VF 8 à sa concurrence directe, soit les Volkswagen ID.4, Nissan Ariya et, surtout, le Tesla Model Y.

Prêt pour notre marché, mais encore des croutes à manger
J’en conclus donc que le VinFast VF 8 2023 réussit à bien s’installer dans le marché sans toutefois rien révolutionner. Les consommateurs seront assurément charmés par le format familial de ce spacieux VUS, son design, sa technologie à bord, son degré de raffinement et, principalement, sa garantie, élément important lors de l’achat.
Mais clairement, ce jeune constructeur apprend encore et devra corriger certaines lacunes. C’est ce qui nous force à prendre un pas de recul et à laisser le temps à VinFast de faire ses preuves avant que nous puissions statuer sur une recommandation.