Dans un monde où tout devient homogène, comment fait-on pour demeurer fidèle à nos principes? Prenez Subaru à titre d’exemple. Le petit constructeur nippon a longtemps joué le rôle du rebelle idiosyncrasique via sa motorisation de type Boxer et ses familiales à rouage intégral. Comment fait-il pour s’intégrer dans le segment monotone des VUS intermédiaires sans perdre son identité?
En 2005, Subaru avait tenté de se distinguer avec le Tribeca, mais son allure étrange, son prix de vente trop élevé et ses dimensions trop compactes l’ont empêché de réellement impacter sur le marché.
En 2019, le constructeur s’est réessayé, mais avec une formule plus classique. On le nomme Ascent : c’est un VUS à l’allure aussi banale que ses concurrents directs. La question qui tue est la suivante : cette grosse Subaru réussit-elle à s’intégrer dans le moule populaire sans perdre son caractère tant adoré?
Étant donné que l’Ascent est un nouveau produit depuis 2019, il franchit l’année-modèle 2020 relativement inchangé, si ce n’est que l’ajout de quelques fonctionnalités pratiques, comme l’alerte d’objets oubliés sur les places arrière, un bouton pour verrouiller le coffre lorsqu’on le ferme, et des rétroviseurs pliables électroniquement – uniquement sur les variantes Limited et Premier.
Pour le reste, ce gros VUS demeure intact. C’est la tradition chez Subaru (à l’exception de la BRZ) : la transmission intégrale vient de série.
L’Ascent est alimenté par un moteur quatre cylindres turbo, et jumelé à une seule boîte de vitesse. S’offrant sous une variété de déclinaisons; partant d’un Ascent Commodité de base à 38 808 $ jusqu’à un rutilant Premier équipé à bloc à 53 108 $, il se situe en plein dans le territoire des Honda Pilot, Toyota Highlander, Ford Explorer, Kia Telluride / Hyundai Palisade, Nissan Pathfinder, Chevrolet Traverse / GMC Acadia, Dodge Durango, Mazda CX-9 et Volkswagen Atlas de ce monde.
Notre modèle d’essai était un Ascent Premier. Positionné au sommet de la gamme, il vient uniquement avec les sièges capitaines. Notre modèle avait un joli habitacle en cuir couleur brun cannelle, des jantes de 20 pouces, des finitions chromées, une chaîne audio Harman Kardon, un écran de huit pouces pour le système multimédia, trois ports USB pour la troisième rangée et un refroidisseur d’huile pour la boîte de vitesses, permettant à l’Ascent de remorquer la charge maximale annoncée par le constructeur.
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Contrairement au Tribeca qui cherchait à se distinguer à tout prix, l’Ascent arbore une formule plus conventionnelle. Cette approche conservatrice lui permet de mieux se présenter comme véhicule utilitaire à vocation principalement familiale.
Par exemple, son habitacle est spacieux, confortable et étonnement bien assemblé. L’agencement entre le cuir brun et le faux bois de la déclinaison Premier est bien exécuté. La position d’assise est agréable et les commandes sont faciles d’accès. La planche de bord, quant à elle, s’affiche sous un design simple, mais ô combien efficace.
Idem pour l’interface multimédia STARLINK qui s’avère l’une des plus conviviales de l’industrie. Bien que ce système puisse paraître rudimentaire lorsqu’on le compare à ce qu’il se fait du côté de la concurrence – surtout par la taille et la définition de son écran - l’accès à l’information est facile, les fonctionnalités répondent rapidement à nos commandes et les boutons physiques sont les bienvenus si l’on porte une paire de gants. Les connexions Apple CarPlay et Android Auto s’offrent de série.
Nous ne sommes toutefois pas convaincus par le deuxième écran situé au-dessus de la planche de bord. Celui-ci affiche une pléthore d’informations parfois inutiles, comme le fonctionnement de la transmission intégrale en temps réel, la pression du turbo, ou même les forces G latérales! Mais pourquoi?
À l’arrière, l’Ascent démontre une ingénieuse exploitation de ses dimensions. La deuxième rangée est ajustable et commodément inclinable, facilitant l’accès à la troisième rangée, surtout pour les grandes personnes.
Toutefois, cette rangée de sièges demeure serrée, servant mieux aux enfants qu’aux adultes. Chose commode, les 19 porte-gobelets peuvent également accueillir des téléphones intelligents. D’ailleurs, la deuxième rangée a été pensée pour qu’elle puisse être positionnée tout prêt d’un des porte-gobelets, permettant à un bambin de facilement y accéder lorsqu’il est assis dans son siège d’auto. Ingénieux.
Au chapitre de l’espace de chargement, l’Ascent se situe en plein milieu de la gamme. Pouvant loger jusqu’à 2 449 litres une fois ses deux rangées de sièges rabaissées au plancher, il est plus polyvalent qu’un Mazda CX-9 ou un GMC Acadia, mais moins logeable qu’un Honda Pilot, un Volkswagen Atlas ou un Chevrolet Traverse, par exemple.
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L’Ascent a été le premier véhicule Subaru à être alimenté par le tout dernier moteur quatre cylindres turbocompressé du constructeur. Ce moteur niche désormais dans les Subaru Legacy et Outback. Il se retrouvera certainement sous le capot des prochaines WRX et WRX STI.
D’une cylindrée de 2,4 litres, il déploie 260 chevaux et 277 lb-pi de couple, il est plus costaud que le défunt six cylindres « H6 » (256 chevaux / 258 lb-pi) tout en développant son couple beaucoup plus bas dans la plage de puissance. Dans l’Ascent, ce moteur ne peut être jumelé qu’à une boîte automatique à variation continue (CVT).
Toutes les déclinaisons, à l’exception du modèle de base, ont une capacité de remorquage de 5 000 livres (2 268 kg). Pour obtenir ce chiffre, le véhicule doit être équipé du refroidisseur d’huile pour la boîte de vitesses. Une fois équipé ainsi l’Ascent se positionne kif-kif avec sa concurrence, sans devoir faire appel à un moteur V6.
Bien que cette configuration entraîne une consommation d’essence remarquable – nous avons enregistré une moyenne combinée de 9,7 L/100 km en hiver – l’absence d’un six cylindres pourrait avoir un impact néfaste sur la longévité du produit.
Rappelons-le, les moteurs Subaru - en raison de leur configuration à plat - ont la fâcheuse manie de consommer plus d’huile qu’un moteur conventionnel. Ajoutez à cela une forte dépendance à la turbocompression et ce 2,4 litres pourrait se montrer moins fiable qu’un V6, sur le long terme, surtout si celui-ci est fréquemment sollicité pour le remorquage.
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En revanche, le fait que l’Ascent soit alimenté par un quatre cylindres lui accorde une sensation de légèreté, lui permettant d’être visiblement plus sportif que la plupart des véhicules du genre. D’ailleurs, nous avons été agréablement charmés par sa dynamique de conduite.
Notre période d’essai s’est déroulée en décembre, lors d’une bonne bordée de neige, l’habitat naturel pour une Subaru.
Faute de me répéter, je continue de croire que Subaru propose encore à ce jour le meilleur système intégral sur le marché en raison de sa répartition de poids quasi parfaite, mais aussi par le positionnement très bas du moteur Boxer. Une telle configuration octroie aux véhicules Subaru un centre de gravité inégalé.
Ajoutez à cela un système préventif, et non réactif - c'est-à-dire une transmission intégrale qui envoie continuellement sa puissance aux quatre roues - et vous vous retrouvez avec un véhicule qui semble avoir été conçu pour les conditions hivernales.
Malgré son allure anodine, l’Ascent est vraiment amusant à conduire, surtout sur des surfaces glissantes, où on le sent bien ancré au sol, se permettant même de faire déraper son train arrière si ce genre de conduite vous allume. Bref, l’âme de Subaru est intacte, à un point tel que l’on a l’impression qu’une Impreza se cache sous sa corpulente carrosserie.
Nous avons également apprécié les reprises du moteur turbo qui livre une plage de puissance constante et étonnement raffinée compte tenu de sa configuration à plat. Les moteurs Boxer ont la fâcheuse manie de « claquer », surtout à froid, mais nous n’avons presque rien remarqué avec ce 2,4 litres tellement il est doux et au point. Les accélérations sont franches, permettant à ce costaud VUS de franchir le sprint 0-100 km/h en moins de sept secondes.
Hélas, la boîte CVT atténue un peu ce caractère sportif. À sa défense, le système de Subaru fonctionne correctement lorsqu’on le compare à la concurrence. Le principe de faux rapports de vitesse que le constructeur nomme Step Logic donne l’illusion d’opérer une réelle boîte automatique.
Mais l’effet élastique – caractéristique bien connue avec les CVT – dilue les performances d’un moteur sublime. Là où la boîte nous a le plus déçus était quand nous avons conduit le véhicule par temps froid. La boîte émettait un cillement désagréable, gâchant l’agrément de conduite de façon importante.
Les freins de l’Ascent se sont montrés faibles lors d’une conduite nerveuse. Ces deux éléments – les freins et la boîte de vitesses – nous laissent effectivement croire que l’Ascent n’est pas le meilleur outil pour remorquer.
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Néanmoins, Subaru tire son épingle du jeu avec l’Ascent car avec plus de 100 000 unités vendues depuis sa sortie, le produit semble fonctionner comme prévu pour le constructeur.
Bien qu’il puisse paraître comme un copier-coller des autres VUS intermédiaires de l’industrie, son habitacle soigné, sa polyvalence agréable et son comportement routier distingué font du Subaru Ascent un véhicule pratique, frugal et unique en son genre, sans toutefois nuire au caractère indomptable des produits Subaru.
Ceci dit, en raison des points énoncés ci-haut au chapitre des freins et de la boîte de vitesses, nous ne recommandons pas le Subaru Ascent 2020 pour tracter une bonne charge. Si vous recherchez un VUS intermédiaire pour remorquer votre bateau les fins de semaine, nous vous suggérons d’opter pour un de ses concurrents alimentés par un moteur V6.
Mais si ce type d’automobile vous attire parce que vous recherchez tout simplement un véhicule spacieux et sécuritaire pour votre famille, sachez qu’un Ascent est un utilitaire clairement plus intéressant qu’une minifourgonnette, vachement plus compétent dans la neige que sa concurrence, et étonnement plus amusant à conduire.