Une recharge à une borne rapide avec le Ford F-150 Lightning permet de confirmer l’intérêt que suscite l’idée d’une camionnette électrique. Les passants s’arrêtent, les propriétaires de camionnettes posent des questions, et les acheteurs de véhicules électriques saluent l’arrivée de ce camion sans émissions sur le marché. Il faut dire que ce F-150 Lightning est le premier à débarquer sur le marché canadien, alors que les Rivian R1T et GMC Hummer EV se font toujours attendre, malgré leur distribution aux États-Unis.
Les questions demeurent nombreuses. Quelle est la performance réelle de ce camion? L’autonomie annoncée est-elle atteignable? Les capacités sont-elles exploitables? Mais surtout, est-il réellement convaincant à jouer son rôle de camion? Un essai approfondi m’a permis d’en savoir plus.

Un style passe-partout
Le dilemme avec lequel Ford a composé pour le style de ce Lightning est le suivant : Il doit être assez différent d’un F-150 normal pour marquer le coup, mais assez proche pour ne pas choquer les habitués de la marque.
Même si j’apprécie les éléments qui le distinguent, notamment la bande lumineuse à l’avant, la calandre fermée et la bande lumineuse à l’arrière, j’estime que Ford aurait pu pousser le bouchon encore plus loin, pour le rendre encore plus exclusif. Après tout, il s’agit de l’un des premiers à être arrivé, ce qui mérite d’être souligné.
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Planche de bord unique
Là où il se distingue, c’est à bord, pour les versions Lariat et Platinum qui sont équipées d’un écran central de 15,5 pouces, plutôt que 12 pouces de la version XLT. Cet écran provient directement du Mustang Mach-E et intègre le système d’exploitation SYNC 4A, dont la qualité graphique et l’intuitivité des commandes est sans reproche. Il n’y a que les commandes numériques de climatisation dans le bas de l’écran qui sont trop complexes et qui demandent trop de précision pour être manipulées à la volée. Résultat : on n’obtient jamais ce qu’on veut du premier coup.
Le reste du tableau de bord est à s’y méprendre avec les autres déclinaisons du Ford F-150. L’instrumentation numérique de 12 pouces avec une présentation unique au Lightning continue d’être facile à lire. Le tableau de bord demeure assez haut, mais l’abaissement dans les portières améliore la visibilité. Vers l’arrière, la vision est bonne même si j’aurais aimé que les appuie-têtes soient rabattables. Autrement, les sièges sont larges, faciles d’accès et bien rembourrés et garantissent un bon confort au long cours.
À la console, malgré l’encombrement causé par le levier de vitesse inutilement gros, la convivialité est là. La recharge par induction est facile à atteindre et la surface déployable permet de manger ou de travailler pendant, par exemple, qu’on attend à une borne de recharge rapide.
À l’arrière, comme pour le F-150 classique, l’espace est plus limité que dans un Chevrolet Silverado ou encore un Ram 1500. Le dégagement de la portière demeure adéquat, et l’assise assez haute pour obtenir un bon confort. Globalement, la qualité de l’assemblage est bonne, même si les plastiques sont de qualité moyenne, tout au plus. Aussi, le « cuir » des sièges ressemble plutôt à du vinyle, une déception compte tenu du prix du véhicule.

Aspect pratique
L’espace plus limité à bord est compensé par un espace de chargement de 400 litres sous le capot à ouverture motorisée, trop lente, par ailleurs. C’est carrément génial comme espace, permettant de placer des bagages à l’abri des intempéries tout en n’encombrant pas l’habitacle. Ce coffre comprend également quatre prises 120 volts et deux prises USB, lesquelles s’ajoutent aux deux prises présentes dans l’habitacle et aux quatre autres prises 120 volts qui se trouvent dans la caisse, en plus de la prise 240 volts. En tout, une puissance de 9,6 kilowatts peut être fournie via ces 11 prises par la fonctionnalité ProPower OnBoard. Il suffit de l’activer par l’entremise du système d’infodivertissement, ou encore avec l’application FordPass pour fournir du courant en toute circonstance, sur un chantier, en camping, ou lors d’une panne de courant. Vous pouvez même configurer l’arrêt de la fonctionnalité quand la batterie atteint un niveau précis. Bien pensé.
Pour accéder à la caisse, le hayon électrique intégrant la fameuse marche de Ford s’abaisse (ou se relève) graduellement à la pression d’un bouton. Huit crochets d’ancrages sont aussi placés aux quatre coins, en plus de lumières DEL. C’est donc dire qu’il n’y a pas de concession à faire en termes de polyvalence; le camion est conçu avec l’aspect pratique en tête.

Puissance qui arrache
Avec la plus grosse des deux batteries – 131 kilowattheures plutôt que 98 kilowattheures – vient une puissance augmentée par rapport à l’édition de base. Avec les deux moteurs électriques, un placé sur chaque essieu, la puissance culmine à 580 chevaux et le couple à 775 lb-pi. Inutile de préciser que la puissance est abondante. Le fait d’enfoncer l’accélérateur au plancher à partir de l’arrêt en mode Sport fait patiner légèrement les pneus avant et catapulte le mastodonte de près de 3 000 kg (6 800 lb). La puissance instantanée ne s’essouffle jamais à vitesse légale, et le tout s’exécute avec beaucoup de douceur et de linéarité.
La masse relativement élevée alourdit cependant le comportement routier. Une inertie est ressentie au changement de cap, mais le centre de gravité très bas et le débattement des suspensions – indépendante à l’arrière – permet au véhicule d’être stable en courbe; il demeure imperturbable, ancré au sol. Il n’y a que la direction trop démultipliée à mon goût qui mériterait d’être améliorée, considérant l’agilité générale du camion.
Contrairement à d’autres manufacturiers, Ford ne permet pas plusieurs niveaux préréglés de freinage régénératif. En fait, il n’y en a qu’un seul : la conduite à une pédale. Personnellement, je l’ai toujours utilisée parce qu’elle est facile à contrôler et fonctionne très bien. C’est facile d’en arriver à un arrêt complet en relâchant l’accélérateur, et les freins demeurent serrés à l’arrêt complet pour sécuriser le véhicule. Pour le reste, si vous utilisez la pédale de freinage, elle est spongieuse et peu communicative, dans le plus pur esprit des véhicules électriques, mais néanmoins prévisible dans sa réaction.

Autonomie optimiste
La version Lariat à grande batterie propose une autonomie annoncée à 515 kilomètres. Dans les faits, en considérant que ce camion est équipé d’un couvercle de caisse qui modifie l’aérodynamisme, j’ai obtenu une moyenne de consommation de 30 kilowattheures par 100 kilomètres, ce qui donne une autonomie théorique de 440 kilomètres en période estivale. Ce chiffre est obtenu en conduisant de la même manière qu’avec un véhicule thermique, sans conduite visant à maximiser l’autonomie.
Évidemment, en faisant nettement plus attention, la consommation peut baisser à 24 ou 25 kilowattheures par 100 kilomètres, octroyant une autonomie d’environ 525 kilomètres, ce qui correspond plus à ce qu’annonce le constructeur. À l’inverse, quand le mercure baisse ou que vous accrochez une remorque à l’arrière, l’autonomie chute.
Par une belle journée de septembre, j’ai tracté une remorque sur laquelle se trouvait une fourgonnette, pour un poids total de 6 000 lb, alors que la capacité du véhicule équipé de l’ensemble de remorquage Max atteint 4 545 kg (10 000 lb). Jamais la puissance n’a fait défaut, au contraire; le couple à bas régime des deux moteurs électriques rend la tâche très facile. Le poids du Ford est aussi un atout, puisqu’il demeure d’une grande stabilité sur la route, même avec une remorque à l’arrière.
Avec cette charge, j’ai obtenu une consommation de 46 kilowattheures par 100 kilomètres sur une distance de 100 kilomètres, sur autoroute et route secondaire. L’autonomie aurait donc été de 285 kilomètres, une baisse de 35 %. En tout temps, l’autonomie affichée au tableau de bord s’ajuste rapidement en fonction de la consommation, mais aussi en fonction des paramètres entrés dans l’infodivertissement par rapport à la charge remorquée, pour que vous puissiez prévoir un arrêt, si nécessaire.
Sachez donc que la consommation varie énormément en fonction du type de conduite, de l’endroit où vous circulez ou de la présence d’une remorque ou non. De façon globale, cependant, l’autonomie annoncée par Ford est difficile à atteindre, mais celle affichée au tableau de bord est fiable.

Recharge
La plupart du temps, la recharge se fait à la maison. Le camion est capable d’accepter 19,2 kilowatts de puissance avec une borne correspondante, ce qui nécessite environ 7 heures pour atteindre 100 % à partir d’une panne sèche, un atout considérant l’énormité de la batterie.
Sur la route, c’est autre chose. Avec les divers tests faits sur une borne de 100 kilowatts, la plus répandue au Québec, la puissance atteint 77-78 kilowatts au maximum, ce qui donne un temps de recharge de 75 minutes pour passer de 12 à 80 %. Disons que ça rallonge le voyage si vous avez une grande distance à parcourir.
En utilisant une borne de 150 kilowatts, qui correspond à la limite acceptée par le camion, le temps de recharge est passé à 50 minutes, pour la même quantité d’énergie, ce qui est plus acceptable. Toutefois, si le véhicule pouvait accepter une plus grande puissance, disons 350 kilowatts, et qu’il serait en mesure de la maintenir, le temps serait encore raccourci. Encore faudrait-il que ces bornes soient disponibles, ce qui est une autre histoire.

Un grand potentiel
La version testée est une Lariat avec ensemble 511A (comprenant entre autres la grosse batterie, la conduite semi-autonome BlueCruise, le toit panoramique et les sièges chauffants à l’arrière), la doublure de caisse pulvérisée et l’ensemble de remorquage Max, pour un prix de 101 815 $. Sachez cependant que pour 2023, le prix de ce même camion monte de plus de 10 000 $.
Malgré le prix encore plus élevé en 2023, ce premier camion électrique montre à quel point les camions pleine grandeur sont tout indiqués pour être électrifiés. Avec le Ford F-150 Lightning, la puissance ne manque pas, tout comme la convivialité, le confort, le silence, le luxe et la technologie. Il n’y a que l’autonomie et la capacité de recharge qui peuvent être handicapants pour certains consommateurs, ce qui prouve que ce camion n’est pas pour tous. Toutefois, il remplit la majorité de ses promesses avec brio.
Le camion à l’essai mérite néanmoins un peu de maturation avant d’être recommandé. Quelques bogues électroniques, notamment en termes de communication entre l’application mobile et le camion, de même qu’une anomalie de « jupe active avant » qui retentit à l’occasion à l’instrumentation montrent qu’il est encore jeune sur le marché. C’est pourquoi nous vous recommandons d’attendre avant de vous le procurer; de toute manière, si vous en réservez un maintenant, il n’arrivera pas avant deux ans.
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