Même si les berlines de Cadillac n’ont aucun succès auprès des consommateurs, je dois admettre que j’aime particulièrement la maturité stylistique que cette division a acquise au cours des dernières années. L’évolution du fameux langage Art & Sciences y est remarquable.
Il faut dire qu’on reconnaît immédiatement une Cadillac à son approche. Ses longues larmes de DEL qui s’étirent de haut en bas à l’avant sont singulières dans l’industrie. Le profil, tout en angles, est cependant passablement plus conservateur. En effet, la ligne est somme toute assez générique et peu originale.
Dans le cas de la CTS-V, Cadillac fait preuve d’un peu plus d’audace avec des ouïes latérales béantes qui permettent une sortie d’air pour la chaleur émanant des freins. Les jantes sont aussi plus distinctives : le modèle d’essai était équipé de jantes de 19 pouces peintes en noir (en option pour la somme de 1 095 $).
Afin de rendre le tout plus sportif et à la hauteur des performances, Cadillac suggère un groupe d’apparat en fibre de carbone. On en retrouve à la prise d’air du capot, aux bas de caisse, à l’aileron et au diffuseur arrière ; tout ça pour la modique somme de 7 195 $.
Pour ce qui est du style arrière, la tradition des feux verticaux se poursuit sans provoquer d’excitation de notre part. Il n’y a que les quatre pots d’échappement qui attirent le regard.
Cadillac se distingue du parc automobile avec une approche singulière quant à la présentation intérieure de ses modèles. Les intérieurs étant tous à peu près identiques, on reconnaît l’esprit de Cadillac avec une finition soignée et un usage de matériaux de très grande qualité. On se noie dans le cuir, les appliques de fibre de carbone ou de boiserie et dans une mer d’alcantara judicieusement répartie dans la cabine. Avec une thématique en V pour la console centrale, on retrouve au sommet les buses d’aération, puis le système multimédia CUE. Amélioré au fil du temps, ce dernier demeure peu intuitif. Malgré la petite vibration au contact, on ne sait jamais trop si le programme a saisi la commande. En plus, la taille des boutons est minuscule, si bien qu’il n’est pas rare d’appuyer au mauvais endroit. Bien que le tout soit très prestigieux, on ne ressent pas le même sentiment « haut de gamme » et de dégagement que chez Audi, BMW ou encore Mercedes-Benz.
La CTS-V a beau avoir les proportions d’une intermédiaire, l’espace intérieur se compte. Et c’est encore plus vrai à l’arrière. Les jambes et la tête fusionneront avec le dossier et le pavillon de toit tant c’est restreint.
Le coffre, quant à lui, n’offre qu’un tout petit 388 litres d’espace de rangement. C’est bien mince face au 530 litres de la BMW Série 5.
La CTS-V fait passer les Mercedes-Benz E63 S et BMW M5 pour des enfants de chœur avec sa puissance de 640 chevaux à partir de son V8 de 6,2 litres. Il faut le faire! Il faut dire que les deux allemandes, même si elles offrent respectivement 603 et 600 chevaux, ont une approche qui demeure nettement plus civilisée. Le succès de leur équilibre s’explique par de complexes rouages intégraux 4Matic et xDrive.
Cadillac favorise une méthode maintenant abandonnée par les allemandes, la stricte propulsion. Avec un couple de 630 livres-pieds aux uniques roues arrière, le train se laisse prendre en mains autant qu’un ivrogne après une soirée bien arrosée.
Heureusement, il existe plusieurs modes de conduite qui pourront tempérer les ardeurs de la mécanique. En mode Sport avec le contrôle de traction désactivé et la transmission automatique à 8 rapports en manuel, vous serez, en l’espace de quelques secondes, capable de faire partir les pneus en fumée. C’est très agréable pour quelques heures. Par contre, au quotidien, on se lasse vite de ce perpétuel combat avec la voiture, et ce, tout simplement pour la garder sur la route!
Le premier qualificatif qui me vient en tête pour décrire le comportement de la CTS-V serait « hystérique ». Dans son cas, Cadillac a fait une affirmation de puissance, mais le rendu ne fonctionne pas aussi bien qu’avec les allemandes ; le raffinement n’y est pas.
La direction donne un certain flou au centre, une réalité incompréhensible considérant les besoins chirurgicaux de précision dans ce segment où on n’exige rien de moins que la perfection dynamique.
Il n’est pas rare de devoir lever le pied en virage pour maintenir sa trajectoire. À la moindre imperfection, même avec les suspensions magnétiques, la voiture sautille et cherche à vous faire prendre le décor. Ce n’est pas une bagnole à mettre entre les mains d’un pilote inexpérimenté.
Indéniablement, on doit faire le rapprochement entre les allemandes Mercedes-Benz E63 S et BMW M5, et la Cadillac CTS-V. Oui, l’américaine est plus puissante, mais quoi faire de toute cette cavalerie si elle se contrôle à peine ? Le succès des allemandes passe par l’équilibre. Elles ont aussi surtout compris qu’avec plus de 600 chevaux, il faut se résigner à offrir un rouage intégral pour contenir le tout de manière acceptable. La CTS-V sera certainement une voiture de collection dans le futur en raison de sa très faible diffusion. Cependant, pour l’heure, Cadillac, avec son approche passéiste, n’est pas en mesure de tenir tête à la compétition.