Au fil de son histoire, l’industrie de l’automobile a constamment tenté d’améliorer l’efficacité énergétique du moteur thermique. Pour des soucis environnementaux, des technologies devaient être développées pour maximiser le rendement des véhicules et réduire leur consommation d’essence sans en sacrifier les performances.
Le turbocompresseur est sans doute l’une des inventions qui a eu le plus grand impact dans cette quête. Aujourd’hui, presque tous les constructeurs équipent leurs modèles de moteurs turbo. Mais pourquoi donc? Comment fonctionne un turbocompresseur? Quels sont les avantages et les inconvénients de cette technologie? Voici une explication détaillée du sujet.

Avant le turbocompresseur, le supercharger
Les premiers concepts de l’induction forcée qui permet d’augmenter le débit d’air dans un moteur thermique remontent à 1878.
À l’époque, des compresseurs, communément connus sous l’appellation anglophone supercharger, étaient utilisés pour augmenter la puissance des premiers moteurs à combustion interne. Pour arriver à leurs fins, ces compresseurs avaient recours à une pompe rattachée au moteur par l’entremise d’un engrenage.
L’industrie de l’aviation s’est ensuite intéressée au principe de l’induction forcée en raison des pertes de puissance causées par la faible densité de l’air à haute altitude. L’ingénieur suisse Alfred Büchi avait concocté un prototype de turbocompresseur en 1905, alimenté par les gaz d’échappement. Le prototype de M. Büchi connaissait cependant des problèmes de fiabilité, ce qui l’a empêché de prendre son erre d’aller.
Si le turbocompresseur a enfin eu une certaine utilité dans les avions, surtout durant la Seconde Guerre mondiale, ce n’est qu’au début des années 1960 qu’il a commencé à être utilisé dans l’automobile.
Même si les moteurs turbo des Chevrolet Corvair Monza et Oldsmobile Jetfire n’ont pas été commercialisés longtemps, ils ont néanmoins marqué les premières tentatives d’équiper une voiture de de cette technologie. Malheureusement, à l’époque, les turbocompresseurs étaient très gros et occupaient beaucoup d’espace dans le compartiment moteur, et leur long délai d’activation a ralenti leur adoption de masse.
Au début des années 1970, à l’aube d’un choc pétrolier et de restrictions polluantes beaucoup plus contraignantes, le turbocompresseur est revenu dans la mire des constructeurs d’automobiles. En ajoutant un turbo à un moteur de plus petite cylindrée, les constructeurs pouvaient préserver les performances tout en réduisant les émissions polluantes et la consommation de carburant.
Des modèles comme la toute première Porsche 911 Turbo, la BMW 2002 Turbo et la Saab 99 Turbo sont aujourd’hui reconnus comme les pionnières du principe. Durant les années 1980, au fur et à mesure que la technologie s’améliorait, l’industrie de l’automobile a été témoin d’une multiplication de moteurs turbocompressés, surtout de la part des marques européennes et japonaises.
Aujourd’hui, en raison de normes d’émission de GES (gaz à effet de serre) encore plus sévères, le turbocompresseur prend tout son sens. Voilà pourquoi il est désormais utilisé par presque tous les constructeurs.

Comment fonctionne le turbocompresseur?
Comme son nom l’indique, le turbocompresseur est essentiellement une turbine attachée au moteur thermique. Elle permet de forcer le débit de l’air à l’intérieur du moteur. Habituellement, le turbocompresseur est accroché au système d’échappement, car ce sont les gaz d’échappement qui le font fonctionner. Voilà la distinction avec le compresseur volumétrique qui, lui, fonctionne grâce à une courroie rattachée au moteur.
Dans les faits, le turbocompresseur est composé de deux sections, la turbine et le compresseur, raccordés par un arbre de transmission. Plus le moteur thermique monte en régime, plus il relâche des gaz d’échappement. Au lieu d’être immédiatement rejetés dans le système d’échappement du véhicule, ces gaz entrent d’abord dans la turbine, ce qui crée une force d’inertie qui fait tourner la turbine et l’arbre. C’est ce mouvement qui anime ensuite le compresseur directement rattaché au système d’admission d’air du moteur.
Plus le moteur monte en régime, plus le débit des gaz augmente, ce qui permet de faire tourner la turbine plus rapidement. Ceci augmente la vitesse du compresseur, la pression de l’air et, par conséquent, son débit dans le moteur. De concert avec l’ordinateur qui gère le débit du carburant au fur et à mesure que la quantité d’air augmente, le moteur peut ainsi développer plus de puissance et produire plus de couple au fur et à mesure qu’il grimpe dans les tours.
C’est ce processus de transfert d’énergie qui crée les délais de réaction (turbo lag) quand on appuie sur la pédale d’accélérateur d’un moteur turbo. Toutefois, certaines technologies comme une programmation logicielle plus avancée ou le turbocompresseur à géométrie variable — capable de transformer les caractéristiques des vannes de la turbine en temps réel — ont permis, au fil du temps, de réduire ce délai. Certains véhicules emploient même deux turbocompresseurs qui s’activent à des moments différents (séquentiel) pour pallier ce phénomène.

Quels sont les avantages et les inconvénients du moteur turbo?
L’avantage évident du turbocompresseur est sa capacité de faire augmenter la puissance et le couple d’un moteur thermique. Voilà pourquoi il se révèle très populaire dans le monde du tuning, car il peut transformer un moteur ordinaire en un monstre de performance.
Dans l’industrie de l’automobile, les constructeurs se sont aussi intéressés au turbo pour augmenter les performances de certaines voitures sport. Plus récemment, toutefois, le turbocompresseur a permis aux constructeurs de réduire la cylindrée des moteurs sans sacrifier leurs performances. La technologie EcoBoost du Ford F-150 en est un bel exemple. Grâce à un V6 biturbo de 3,5 litres, cette camionnette peut développer plus de couple que le moteur V8 et réduire sa consommation de carburant et ses émissions de GES. Au Québec, ce moteur permet aux propriétaires de F-150 d’éviter de payer la taxe sur la cylindrée.
En outre, puisque le moteur turbo permet de recycler les gaz d’échappement, il devient automatiquement plus efficace énergétiquement qu’un moteur atmosphérique. Les données de consommation de carburant et d’émissions de GES des moteurs turbocompressés sont habituellement plus basses que ceux des moteurs thermiques de cylindrée égale.
Il est toutefois important de souligner que, quand le moteur turbo performe au maximum de ses capacités, l’effet inverse est ordinairement observé, c’est-à-dire que la consommation de carburant augmente.

Plus complexe et moins fiable
En raison de toute la complexité du système, le moteur turbo est inévitablement moins fiable que le moteur atmosphérique. Même si ces moteurs, dans certains cas, se sont montrés très solides à long terme, ils nécessitent habituellement des entretiens plus rigoureux et coûteux qu’un moteur atmosphérique.
La turbocompression exerce habituellement une plus grande pression sur le système de refroidissement du moteur, ce qui requiert habituellement de l’équipement supplémentaire, comme un refroidisseur intermédiaire (intercooler). Plus il y a de pièces dans le compartiment moteur, plus le risque de bris augmente. Soulignons également que les moteurs turbo nécessitent en général de l’essence super pour bien fonctionner, ce qui fait grimper la facture de carburant.
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