Un peu moins de 4 000 véhicules seront livrés cette année par les différents concessionnaires Volvo canadiens. C’est peu. Très peu. Et c’est d’autant plus alarmant lorsqu’on constate que plusieurs des véhicules vendus par la firme suédoise se trouvent dans des catégories pourtant très prisées du public. Alors…il est où le problème?
Bien sûr, on pourrait facilement expliquer le désintérêt de la clientèle face à la marque au non-renouvellement de certains modèles phares, comme le XC90, inchangé depuis 2003. Même la berline S60, pourtant renouvelée en 2011, est déjà sur son déclin. Vous aurez donc compris que les produits demeurent la principale raison pour laquelle la clientèle, jadis fidèle, s’est massivement tournée vers la concurrence ces dernières années. Cela dit, le problème est plus complexe.
Volvo s’est en fait retrouvé dans le giron de Ford au tournant du nouveau millénaire, période au cours de laquelle le renouvellement des produits s’est fait de façon timide. Du côté de Volvo, Ford avait en fait davantage mis l’accent sur le développement de nouvelles technologies en matière de sécurité, pour ensuite les utiliser chez la plupart des modèles de sa grande. Mais dans les faits, toute la stratégie de mise en marché de la marque a un peu été mise de côté.
En fort déclin, Volvo s’est ensuite retrouvée dans les mains d’intérêts chinois (en 2011), au moment où la situation de la marque était critique. Au même moment, on assistait d’ailleurs à la disparition de plusieurs marques d’automobiles de renom, dont Saab, qui rivalisait directement avec Volvo depuis des lunes.
Ainsi, depuis quatre ans, Volvo tente de sauver les meubles avec une ligne de modèles vieillissante. Tant du côté canadien qu’américain, les chiffres de ventes ont dramatiquement chuté pour atteindre un niveau si bas qu’il en allait de la survie de la marque. Heureusement, sur certains marchés, Volvo est demeuré beaucoup plus actif, notamment grâce au modèle V40. Cette compacte à hayon, qui joue à la fois sur le terrain des Mercedes-Benz de Classe B et des BMW X1 (en version Cross Country), aurait d’ailleurs connu un succès considérable de ce côté-ci de la frontière nord-américaine. Les concessionnaires canadiens ont d’ailleurs fortement manifesté leur intérêt, tout comme les têtes dirigeantes de Volvo Canada. Hélas, parce que nos voisins du sud n’y voyaient pas d’intérêt, et que la division canadienne ne faisait à l’époque que tenter de garder la tête hors de l’eau, l’homologation du modèle pour l’Amérique du Nord n’a pas eu lieu.
L’absence de ce modèle fait d’autant plus mal aux concessionnaires canadiens, qui ne proposent plus aucun de modèles d’entrée de gamme depuis 2013, soit depuis la disparition de la C30. Ainsi, la Volvo la moins chère en 2015 au Canada consiste en une berline S60 à roues motrices avant, vendue à environ 39 000$. Fait intéressant, la jolie C30 était l’œuvre du designer québécois Simon Lamarre, aussi responsable de celui de la V40. Alors Simon…tu nous manques !
Un souffle nouveau…
Depuis quelques mois, Volvo propose aux acheteurs nord-américains la nouvelle V60 qui dans les faits, n’est qu’une version familiale de la berline S60. Quelques changements ont été apportés afin de les garder au goût du jour, notamment en matière d’équipement. Mais Volvo a surtout lancé récemment une nouvelle famille de moteurs à quatre cylindres turbocompressés, qui permettront d’apporter un nouveau souffle à la gamme, tout en diminuant de façon marquée la moyenne de consommation d’essence de ses produits.
On lancera aussi sous peu le très attendu XC90 2016, premier modèle à avoir été entièrement développé par Volvo depuis des lustres, les autres produits de la marque partageant des éléments provenant de chez Ford. Ce dernier, qui ne sera offert qu’avec des moteurs à quatre cylindres, proposera des puissances variant entre 300 et 400 chevaux. Ultérieurement, une version enfichable fera même son entrée chez nous, et constituera pour le marché nord-américain une première incursion dans le monde des hybrides pour Volvo.
Une nouvelle berline de grand luxe (S90), viendra aussi reprendre le flambeau de l’actuelle S80, une voiture sur le respirateur artificiel qui figure cette année dans le top 10 des voitures les moins vendues au pays. Suite à cela, attendez-vous à voir débarquer une nouvelle génération de la XC70 Cross Country, qui pourrait peut-être recevoir une nouvelle nomenclature.
Question de confiance
Volvo Canada possède actuellement un petit réseau de concessionnaires, qui ne grossira certainement pas dans un proche avenir, étant donné les faibles ventes du constructeur au pays. D’ailleurs, on retrouve actuellement 41 concessionnaires canadiens, qui vendent grosso modo 4 000 véhicules par an. Vous aurez donc compris que le plan d’affaires est actuellement un peu boiteux.
Il faut toutefois mentionner que plusieurs propriétaires de voitures Volvo ont cependant manifesté un mécontentement face à la fiabilité de leur voiture, mais aussi face au service reçu chez les concessionnaires. Et à ce sujet, Volvo Canada admet qu’il y a du travail à faire pour améliorer le service après-vente, tant du côté des concessionnaires que des stratégies mises en place par le manufacturier. C’est d’ailleurs pour cette raison que Volvo Canada travaille actuellement sur un projet pilote qui permettrait à un client de toujours traiter avec le même conseiller technique et le même mécanicien. Ce processus permettrait d’effectuer un meilleur suivi périodique, de diminuer le temps d’attente lors des entretiens, et de déceler plus facilement les problèmes qui pourraient survenir. Puis, bien évidemment, on parviendrait plus facilement à rassurer le client, pour qui la confiance aurait peut-être été écorchée dans le passé.
Dans la région métropolitaine de Montréal, le problème de confiance de la clientèle est à ce point important que plusieurs garages indépendants, spécialisés uniquement dans les produits Volvo, font actuellement des affaires d’or en effectuant l’entretien périodique et les réparations de ces voitures. Un phénomène qui est aussi survenu du côté de Volkswagen/Audi, dont la réputation de qualité du service après-vente avait elle aussi été fortement affectée dans un passé pas si lointain.
Naturellement, Volvo Canada souhaite contrer cette situation, et changer les mœurs de la clientèle qui aurait selon elle tout intérêt à faire l’entretien de leur véhicule chez un concessionnaire qualifié. Hélas, plusieurs de ces garages indépendants ont justement été lancés par d’anciens mécaniciens, qui avaient sans doute flairé la bonne affaire. Bref, Volvo a ici un défi de taille à relever.
En 2015, pourquoi une Volvo?
Une des grandes questions que soulève la clientèle lorsque vient le temps de considérer une Volvo consiste en la pertinence, ou l’avantage de choisir un produit de la marque, par rapport au modèle d’une concurrence aussi nombreuse qu’agressive. Jadis, on défendait un style et un mode de vie distinctif, ainsi qu’une longueur d’avance considérable en matière de sécurité. Sauf qu’aujourd’hui, ces points sont drôlement moins évidents à défendre. Le style des voitures a perdu en personnalité et la sécurité des modèles concurrents s’est améliorée au point d’égaler celle de la plupart des produits Volvo.
Les Volvo ne sont pourtant pas dépourvues d’arguments pour convaincre, particulièrement en 2015, avec cette multitude de nouveaux gadgets ajoutés sur plusieurs modèles. Mais ces distinctions ne sont pas nécessairement évidentes à déceler pour l’acheteur, qui doit hélas compter sur un vendeur pas toujours à l’affût des technologies de la concurrence pour bien distinguer son produit, et ainsi vendre sa salade.
Volvo Brand Experience Center : la solution?
Volvo possède pourtant à Göteborg, en Suède, un centre aussi moderne que complet qui permet de faire découvrir aux visiteurs toutes les distinctions et avantages de leurs produits, tout en leur permettant de découvrir aussi un style, un mode de pensée et une philosophie extrêmement différente de celles des autres fabricants de voitures de luxe.
Bien évidemment, ce centre extrêmement volumineux (le Volvo Brand Experience Center) ne pourrait être transposé à chacun des concessionnaires, afin de leur permettre de mieux vendre leurs produits. En revanche, il serait possible à plus petite échelle de reproduire certains des éléments du centre chez les concessionnaires, pour ainsi permettre aux clients de découvrir certains avantages du produit, tout en vivant une expérience d’achat aussi nouvelle que distincte.
Il serait par exemple possible, grâce à un simulateur de conduite, de faire découvrir à l’acheteur les vertus des différents systèmes de sécurité active, ou encore d’illustrer avec un présentoir de véhicule accidenté, le procédé de fabrication du produit, incluant les zones de déformation et la quantité phénoménale de sacs gonflables présents sur le véhicule. Et pour y mettre une touche un peu plus sexy, l’expérience tactile des matériaux utilisés à bord de la voiture, face à celle de produits concurrents, pourrait aussi être intéressante. Bref, Volvo possède dans sa manche une solution qui permettrait aux concessionnaires de finalement se distinguer. Il ne suffit en fait qu’à l’exploiter.
Maintenant, reste à voir si la quarantaine d’employés qui luttent pour la relance de la marque au pays saura tirer son épingle du jeu. D’une part, il leur faudra innover pour proposer une expérience d’achat et de possession plus intéressante, mais il faudra aussi qu’on puisse se distinguer davantage de la division américaine, qui ne compose bien sûr pas avec la même réalité commerciale que la filiale canadienne.
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