Je crois que je n’apprends rien à personne si je dis que le marché de l’automobile actuel est chamboulé. Nouvelles technologies, prix de vente à la hausse, pénurie de véhicules, problèmes d’approvisionnement, électrique contre hydrogène… l’industrie est en plein changement.
Lors d’une visite éclair à Detroit pour la présentation du Cadillac XT4 2024, un autre élément voué à être modifié au cours des prochaines années m’a sauté aux yeux. Durant l’introduction, le président de Cadillac Canada, Mike Speranzini, a déclaré que l’entreprise comptait ouvrir plusieurs nouvelles concessions d’automobiles dédiées à la marque de luxe de GM. Le directeur expliquait que 20 projets sont en développement, et que le fabricant désire encore mieux implanter son réseau d’un océan à l’autre.
Avec tous les changements que nous vivons actuellement dans l’automobile, serait-il un peu surprenant de vouloir reprendre la formule des concessions physiques? Quand on sait que Tesla réussit à bien tirer son épingle du jeu en vendant exclusivement ses véhicules en ligne, qu’Audi, Ford, Genesis, et Volvo ont effectué plusieurs tests sur le web, est-ce que l’ère des concessions traditionnelles est révolue?

Cadillac à la conquête du Canada
L’emblématique société de luxe croit au contraire que les concessionnaires seront un avantage dans le bouleversement automobile actuel. Selon l’information que j’ai pu recueillir de Mike Speranzini, les établissements permettent à Cadillac d’augmenter ses contacts avec la clientèle, d’offrir un service supérieur et de faire vivre la marque aux futurs propriétaires. D’ailleurs, le président s’est empressé de me dire à quel point le centre de Luciani Cadillac, nouvellement ouvert à Montréal, était l’exemple parfait de la direction que l’entreprise désire prendre.
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Il m’a alors expliqué que, dans un futur plutôt proche, le concept consisterait à transformer les concessions en galerie d’exposition. Un peu comme un musée, les clients de la marque entreraient dans un lieu sophistiqué, où les voitures sont mises à l’avant-plan. Une idée qui ne me déplait pas du tout.

J’aime les contacts physiques
Je ne vous cacherai pas que je fais partie de ceux qui apprécient visiter une concession pour faire l’acquisition d’un véhicule. Bien évidemment, les situations problématiques, parfois sur la ligne de l’illégalité, de frais dissimulés, de montant surprise sur la facture ou de circonstances où le service pourrait être qualifié de désagréable, me glacent le dos. En revanche, j’adore aller observer le véhicule que je désire me procurer. Toucher les matériaux, mettre à l’épreuve le confort des sièges et l’ergonomie du véhicule, voir de plus près le style et les performances me donner une impression de bien-être difficilement explicable (bon, je suis un amateur de voitures!). Je suis une personne qui a un bon gabarit, il m’est donc impossible d’acheter un véhicule sans avoir déterminé si l’espace intérieur est suffisant pour moi et mes occupants.
À mon avis, c’est ce phénomène qui établit une dissonance avec l’achat en ligne d’automobiles. Il est toujours agréable de regarder une vidéo sur le site de RPM pour découvrir un produit, ou de lire un excellent essai de l’un des journalistes de l’équipe (il faut bien que je prêche pour ma paroisse). Toutefois, il reste une étape importante avant de véritablement passer à l’action, il faut prendre contact. Même en utilisant un casque de réalité augmentée, il est, à mon humble avis, impossible de vivre une émotion similaire qu’avec une rencontre physique.
Les fabricants boudent les salons de l’automobile, mais, malgré tout, les consommateurs se déplacent en grand nombre à ces événements (du moins, au Québec). Enlevons les foires et les concessionnaires, comment pourrons-nous prendre contact avec les véhicules? Je sais que nous parlons de service de voiturier à la maison pour découvrir une marque, ou que certains constructeurs estiment que le numérique sera la solution pour effectuer un achat, mais je crois que les concessions ont encore leurs places dans le paysage.

L’achat en ligne
Comprenez-moi bien, je ne suis pas anti-achat sur le web, je trouve que, au contraire, cette méthode de magasinage évite plusieurs irritants dont la pression qu’exerce certains représentants sur leur client ou la tension vécue dans le bureau du directeur commercial. Je pense même que c’est plus que jamais une solution simple et efficace, mais est-ce que l’acquisition en ligne est en mesure de remplacer du tout au tout le contact et le « plaisir » de se procurer une voiture? Je crois que non, et c’est exactement pour ça que Tesla a en fin de compte aménagé des établissements de service.
Laissez-moi vous rappeler que, au départ, la société souhaitait vendre exclusivement en ligne ses véhicules, et que rien ne laissait présager que des points de service pour effectuer des essais routiers allaient voir le jour. Après un immense succès et un désir croissant des automobilistes à prendre contact avec les produits, Tesla a inauguré des centres de service (soyons réalistes, des concessions sans représentant) pour permettre aux amateurs de la marque de faire un choix éclairé. J’ai tourné les coins ronds sur l’aménagement et la vision de Tesla, mon objectif ici consiste à parler de l’importance d’avoir un endroit matériel malgré tout.
Si l’une des entreprises les plus avant-gardistes sur le sujet a enfin pris la direction d’ouvrir des lieux physiques, pourquoi ne pas envisager que les concessions sont là pour rester, mais qu’elles changeront d’orientation? Elles doivent réorienter leur offre, nous sommes d’accord, mais à l’ère où le numérique dominera, les concessions se doivent d’être le porte-étendard de l’émotion qu’est l’acquisition d’une automobile. Je crois que cette formule hybride entre l’ancienne méthode et la nouvelle est une avenue intéressante pour le futur magasinage. Il est évident que, avec l’avancée de la technologie, certaines techniques ancestrales seront vouées à disparaître, restons ouverts au progrès, mais rappelons-nous que l’achat d’une voiture reste le deuxième plus gros achat dans notre vie après la maison pour la plupart des Québécois. Essayons donc de garder cette flamme et de conserver le plaisir de se procurer un nouveau bolide.