Il y a deux semaines, j’atterrissais à Hanoi, au Vietnam, pour découvrir VinFast, ce nouveau constructeur dont on ne parlait même pas il y a un an, mais qui prétend vouloir s’installer sur notre territoire avec les VF 8 et VF 9 électriques.
J’étais curieux d’en apprendre davantage sur cette marque au nom rigolo, mais aussi de découvrir la culture vietnamienne et son intérêt pour l’automobile. Parce que non, le Vietnam n’a, jusqu’à ce jour, jamais construit de voitures.
Dans la foulée des nouveaux constructeurs émergents qui prétendent vouloir bouleverser l’ordre établi, VinFast est de loin celui qui y va de l’approche la plus sérieuse et avec de très grandes ambitions.

Le constructeur a d’ailleurs annoncé qu’il prévoit construire une usine d’assemblage en Caroline du Nord d’ici 2024. Celle-ci créera jusqu’à 7 000 emplois dans la région, un investissement de 6,5 milliards de dollars US.
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Mais bon. Des constructeurs asiatiques qui prétendent vouloir s’installer chez nous, on en a déjà vu plusieurs. Certains ont réussi avec beaucoup de succès, tandis que d’autres, comme Daewoo, Isuzu et, même, Suzuki, ne sont pas parvenus à maintenir une part de marché assez importante pour confortablement se positionner en Amérique du Nord. On prend donc l’arrivée de VinFast avec un grain de sel.
Des tentacules dans tout
Évidemment, le Vietnam que j’ai visité n’a rien à voir avec celui que le touriste québécois moyen se mettrait sous la dent. Dans mon cas, il s’agissait plutôt d’un voyage de séduction, orchestré par Vingroup, le gigantesque conglomérat qui se cache derrière VinFast.
Fondée en 1993 par le milliardaire Pham Nhat Vuong, Vingroup, dont la valeur boursière est estimée à 3 milliards de dollars US, œuvre dans 13 secteurs d’activité, dont l’immobilier, l’hôtellerie, le transport en commun, le médical, la technologie et, même, l’éducation.

Nul besoin de vous cacher que l’entreprise voulait rapidement me montrer à quel point elle est belle, bonne et performante. Sans surprise, elle m’a hébergé tout au long de mon séjour dans deux de ses magnifiques complexes hôteliers installés sur 45 sites différents dans tout le pays. Certains d’entre eux sont même situés sur des îles privées. Rien de moins.
Portant le nom de Vinpearl, ces titanesques hôtels proposent aux touristes la crème de la crème en matière de luxe et de confort. Certains d’entre eux sont même jumelés de parcs d’attractions portant le nom VinWonders. Évidemment, c’est Vingroup qui assure le transport des touristes sur ces îles aux eaux turquoise avec son service de transport en commun nommé – vous allez me voir venir - Vinbus.
Si RPM m’envoyait au Vietnam dans l’unique but de conduire un VF 8 de préproduction, le géant vietnamien avait manifestement d’autres plans pour moi.
Car avant d’arriver à la portion automobile, il fallait d’abord visiter VinHomes, une immense micro-communauté installée en plein centre de Hanoi où l’on trouve des plages artificielles, des commerces et de titanesques tours à condominiums qui se construisent à une vitesse déconcertante. Ensuite est venue la tournée de VinUni, un campus ultra moderne installé à même la communauté de VinHomes où l’on doit payer l’équivalent de 45 000 dollars US par année pour étudier.

Le Vietnam et l’automobile
Jusqu’à présent, je n’avais encore rien vu de VinFast, si ce n’est quelques modèles qui circulaient sur les routes du pays. Il s’agissait de la berline LUX A2.0 et du VUS LUX SA2.0, essentiellement des BMW Série 5 et X5 recarrossés et uniquement vendus au Vietnam dont le design provient de chez Pininfarina. Ils détonnaient dans le paysage automobile somme toute déprimant par leur élégante calandre ornée d’un puissant éclairage à DEL en forme de V.
Parce qu’au Vietnam, outre VinFast, le parc automobile se résume aux marques asiatiques et sud-coréennes. Les allemandes et les américaines se font rares.
Enfin, nous sommes arrivés à l’usine de VinFast située en banlieue de Haiphong. C’est là qu’une monumentale structure, toujours en forme de V et qui semblait s’inspirer d’une bande dessinée Michel Vaillant, nous attendait.

Construit il y a 4 ans à peine, cet énorme complexe manufacturier installé sur une île a été carrément bâti là où il y avait anciennement l’océan. Et pour le mettre en place, VinFast a appelé les meilleurs ingénieurs de la planète, notamment d’ex-employés de General Motors spécialisés dans la construction d’usines automobiles dans les pays émergents.
Totalisant 3 350 000 mètres carrés, l’installation, qui comprend une presse d’acier, un centre de peinture, une chaîne d’assemblage, une usine de construction de moteurs et une usine de construction de batteries, a été élevée en l’espace de 21 mois seulement. Au moment d’écrire ces lignes, elle produit 207 véhicules par jour, sans compter les scooters électriques également commercialisés par le constructeur.
Avec cette usine qui s’inspire des procédés d’assemblage européens, VinFast vise une capacité de production finale de 950 000 véhicules par année au Vietnam seulement.

Plusieurs questions sans réponse
Mon séjour s’est terminé lors d’une table ronde avec nul autre que le fondateur, M. Vuong et Mme Thi Thu Thuy, vice-présidente de Vingroup et VinFast. Des questions, nous en avions en masse, car malgré ses impressionnantes installations et ses beaux hôtels, Vingroup n’avait jusqu’à présent convaincu personne qu’elle a ce qu’il faut pour capter l’intérêt des automobilistes nord-américains.
Ma question au créateur était la plus évidente : comment VinFast croit-elle qu’un principe de location de batteries puisse fonctionner après que d’autres constructeurs, comme Renault, en France, l’aient essayé sans succès ?
On me répondit que VinFast misera surtout sur les coûts d’utilisation du véhicule, qui sont plus bas qu’un véhicule à essence, pour justifier la tarification d’une batterie en surplus. Une réponse étrange étant donné que les propriétaires actuels de VÉ profitent déjà d’une économie à ce chapitre.
En effet, il y encore énormément de zones grises dans les ambitions de VinFast, ce qui nous force à mettre un pied sur les freins avant de s’emballer. Comment VinFast compte-t-elle convaincre les consommateurs d’ici qu’il est mieux d’acheter vietnamien plutôt que japonais, sud-coréen, américain ou allemand ? Même le tout puissant M. Vuong n’avait pas de réponse claire à nous donner à ce chapitre.
Chose certaine, ce constructeur a les reins solides. Tout comme le géant industriel Hyundai, qui œuvre dans un modèle d’affaires semblable, VinFast pourrait rapidement nous surprendre et devenir un constructeur de taille dans l’industrie des véhicules électriques de demain. Sommes-nous prêts pour le rouleau compresseur vietnamien ?
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