En lisant le texte de mon collègue Samuel Tremblay-Michaud sur le Nissan Murano de nouvelle génération, je n’ai pu m’empêcher de me poser la même question, pour une énième fois : pourquoi les constructeurs se sentent-ils toujours obligés de modifier ce qui fonctionne pourtant si bien? Ici, je fais référence au moteur VC-Turbo nouvellement installé sous le capot du Nissan Murano, un moteur pourtant bien connu et si souvent décrié depuis quelques années sous le capot de l’Infiniti QX50.
Une réponse à une question que personne n’a posée
Cet engin, un 4-cylindres turbo de 2,0 litres, est muni d’une technologie de compression variable qui doit, en théorie, améliorer la réactivité de la mécanique tout en diminuant la consommation de carburant. Et sur le papier, ça fonctionne : les émissions homologuées de gaz à effet de serre de ces moteurs sont plus faibles que les moteurs qu’ils remplacent, ce qui avantage le constructeur qui a donc moins de pénalités à payer en fin d’année.
Dans les faits, c’est triste. En plus d’être complexe avec un risque d’altération de la fiabilité, ce moteur est désagréable à utiliser parce qu’il réagit avec beaucoup de délais, tout en n’améliorant pas la consommation de carburant. Le consommateur est donc perdant dans tous les sens, comme nous l’avons souligné depuis déjà plusieurs années avec l’Infiniti QX50.
- À LIRE : Les frais de concessionnaire qui gonflent votre facture
- À LIRE : Nissan Murano Platinum 2025 : je m’ennuie déjà du V6
C’est à peu près le même constat que nous avons fait avec le Nissan Rogue depuis qu’il utilise une version à 3 cylindres de ce moteur VC-Turbo. Le rendement mécanique est déplorable, tout en n’améliorant pas significativement la consommation de carburant. Tant d’efforts pour un résultat aussi pitoyable.
Je pense aussi aux portes de recharge motorisées de certains véhicules électriques. Chaque jour, sur les réseaux sociaux, un internaute se plaint que la porte de recharge de son Chevrolet Blazer EV ou de son Cadillac LYRIQ refuse d’obtempérer. Déjà qu’elle est chancelante en plein été avec son ouverture supposément chorégraphique, imaginez le résultat quand la neige et la glace se met de la partie. D’ailleurs, au moment d’écrire ces lignes, certains véhicules circulent même avec une porte arrachée, en attente d’une réparation de la part du concessionnaire… incapable d’obtenir des pièces parce qu’elles sont en rupture de stock. Ça fait dur.
L’expression « patente à gosse » peut aussi être appliquée à plusieurs types de sélecteurs de vitesse. J’ai en tête le levier électronique du F-150 qui peut se rabattre dans la console de manière motorisée pour dégager l’espace nécessaire au déploiement de la tablette de l’accoudoir. Le tout se passe dans un ballet saccadé qui augmente l’anxiété à la même vitesse que le risque de bris. Je pense aussi aux boutons « pousse-tire » mélangeants qu’on retrouve chez Acura et qui demandent de s’y concentrer, sans oublier par l’inutile et énorme levier électronique qui prend toute la console dans un GMC Sierra.
Les vraies solutions
Pourtant, dans les trois cas, les technologies efficaces existaient déjà et n’avaient pas besoin d’être modifiées.
Il y a déjà sur le marché des véhicules similaires au Nissan Murano, à l’Infiniti QX50 et même au Nissan Rogue avec des mécaniques nettement plus simples, qui consomment moins de carburant et qui sont plus agréables à utiliser, tout en étant plus fiables. On n’a qu’à penser à certains moteurs 4-cylindres turbo conventionnels, comme ce qu’on retrouve chez Toyota avec le 2,4 turbo, et même à certains moteurs V6, comme le 3,5 litres de Honda. De plus, d’autres technologies se démocratisent et améliorent l’expérience au volant, comme les mécaniques hybrides (Honda, Toyota, Ford), très bien adaptées tout en étant fiables.
Pour ce qui est de la porte de recharge, je n’ai pas besoin de faire un dessin. Plusieurs véhicules sont munis d’une porte à ouverture manuelle qui fonctionne bien en toutes circonstances. Il y a même des véhicules avec des ports de recharge à ouverture motorisée, mais dont la conception est nettement plus simple (Hyundai et Tesla), et qui n’ont pas de problèmes.
Dans le domaine des leviers de vitesse, la compagnie qui a trouvé la vraie réponse est Stellantis, avec la molette. L’ordre est le même que celui qu’on connait depuis la nuit des temps (P-R-N-D) et il y a une butée à chaque bout, de telle sorte que pour passer du R au D, on tourne la roulette vers la droite jusqu’à atteindre la butée. Pour passer du D au P, on tourne vers la gauche pour passer 3 résistances et enfin atteindre la butée, ce qui confirme qu’on est au P. Peut-être que ça fait moins « viril » (honnêtement, on s’en fout), mais ça libère l’espace dans la console (Salut Ford et GMC!) et c’est ultra facile à utiliser (Salut Acura!).
À force de trop vouloir en faire
Bref, à force de trop vouloir épater la galerie, les constructeurs se mettent les pieds dans les plats. Ça fait des technologies tantôt inutiles, tantôt difficiles à utiliser ou tantôt encombrantes.
Peut-être que les constructeurs se disent qu’en faisant différent, le côté spectaculaire des technologies innovantes qu’ils tentent de mettre en place épatera quelques acheteurs potentiels au point de les faire signer en bas de la feuille. En fait, c’est sûrement ça leur réflexion. Mais à mon sens, il y a bien plus de risque que ces acheteurs ne se fassent plus prendre une autre fois et qu’ils refusent de racheter un véhicule de la même marque. Comme quoi la simplicité, ça peut aussi être payant à long terme.
POURRAIT VOUS INTÉRESSER