Cette fameuse voie de gauche truffée de conducteurs qui ne comprennent pas le code

Vous vous êtes sans doute retrouvé un jour au cœur d’une discussion sur les pires comportements des automobilistes sur la route. À chaque sondage sur la question, on retrouve bien souvent dans le top 3 le non-respect de la voie de gauche. Celle qui, dans une zone de 80 kilomètres/heure ou plus, n’est sensée accueillir que les véhicules qui en dépassent un autre. Il en a été décidé ainsi afin de favoriser une meilleure fluidité de la circulation et, surtout, d’améliorer la sécurité et de s’assurer que les conducteurs ne dépassent que par un seul côté au lieu de zigzaguer partout.

Il m’arrive fréquemment de voir quelques véhicules se suivre à distance dans la voie de gauche, cinq ou six autres se tenir dans la voie du centre, d’une manière tout aussi espacée, et de me dire que tout ce beau monde pourrait simplement occuper la voie de droite. On se retrouverait avec deux voies complètement libres. Mais étonnamment, on sent le besoin d’occuper l’espace, comme si l’humain avait horreur du vide.

Moi qui suis un disciple des systèmes et des conventions, il m’arrive aussi de rêver à des véhicules intelligents qui comprendraient les notions de base de la conduite d’une automobile et qui se positionneraient automatiquement dans la bonne voie, selon les circonstances. Je suis convaincu que la circulation serait plus fluide sur nos routes si les conducteurs étaient délaissés de leurs fonctions.

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Pourquoi est-ce si difficile de respecter cette notion de base? Est-ce simplement du je-m’en-foutisme de la part des conducteurs qui, de nos jours, ont tous les droits et aucune obligation? Est-ce un manque d’éducation? Il est vrai qu’on enseigne à décoder des panneaux dans les cours de conduite beaucoup plus qu’on enseigne les codes de conduite. S’agit-il d’un manque de sensibilisation ou de répression de la part des autorités? Qui a déjà vu une contravention pour avoir circulé dans la voie de gauche sans dépasser?

Je dirais un peu tout. Le code de conduite se perd depuis des années au profit de l’individualisme, et les autorités misent sur ce qui est simple et payant en répression. Les technologies modernes en sécurité et les gadgets technos ont aussi grandement déresponsabilisé les conducteurs. Beaucoup sont de nos jours assis dans leur voiture comme s’ils étaient dans leur divan du salon, concentrés sur tout, sauf sur la conduite et sur leur environnement.

Mais je circule à gauche à la limite de la vitesse permise, j’ai le droit.

La fameuse réponse que beaucoup utilisent pour se justifier en parlant de la voie de gauche : « Je circule à gauche à la vitesse permise, celui en arrière n’a pas d’affaire à vouloir me dépasser. » Sachez que c’est un mauvais raisonnement.

L’article 324 du code de la sécurité routière stipule que Sur une chaussée à deux voies de circulation à sens unique, le conducteur d’un véhicule routier doit utiliser la voie d’extrême droite. Sur une chaussée à trois voies ou plus de circulation à sens unique, il doit utiliser l’une des voies de droite…

L’article 325 ajoute pour les limites de vitesse inférieures : Toutefois, le conducteur d’un véhicule routier qui circule à une vitesse inférieure à celle de l’allure de la circulation ou d’un véhicule à basse vitesse doit conduire sur la voie d’extrême droite, à moins qu’il ne s’apprête à tourner à gauche, à stationner ou à effectuer un arrêt sur le côté gauche et qu’il en ait signalé son intention.

En conclusion, circuler sur une autoroute dans la voie de gauche sans dépasser, c’est une infraction au code de la sécurité routière, tout comme rouler trop vite. Vous ne pouvez légitimer votre infraction en invoquant le fait de ne pas commettre une autre infraction. C’est une question de loi, mais aussi de bon sens. Ce type de comportement apporte le tailgating, qui consiste à suivre si près qu’un freinage brusque du véhicule précédent conduirait inévitablement à un accident, et il est source d’accidents et d’épisodes de rage au volant.

Quand on se compare, on se console?

Mon métier de journaliste automobile m’a amené à conduire un peu partout dans le monde et à étudier la question. Le phénomène existe-t-il juste au Québec? Eh non, la voie de gauche se fait malmener un peu partout dans le monde.

Au Québec, même si l’on rencontre beaucoup de conducteurs dans la voie de gauche, la majeure partie changera de voie à l’approche d’un autre véhicule quand la situation est très évidente. Certains reviendront curieusement dans la voie de gauche dès votre passage pour reprendre leur chemin.

L’Ontario est assez pénible à ce chapitre, comme les États-Unis dont les autoroutes possèdent bien souvent une panoplie de voie de circulation. Puisqu’il est impossible de circuler, les conducteurs doivent tricoter d’une voie à l’autre, car beaucoup sont insensibles à l’idée de se tasser. La notion ne semble tout simplement pas exister, malgré des enseignes Left lane for passing only présentes en bordure des autoroutes et censées renforcer l’idée.

Qui sont les plus respectueux?

La palme du respect des codes de la route revient aux Allemands. Quel plaisir de circuler sur des routes où les conducteurs ont encore à cœur le respect des codes de la route, des autres conducteurs et, surtout, de la responsabilité de conduire. Rarement vous verrez sur leurs autoroutes des « zombies » de voie de gauche. Les camions sont à l’extrême droite et ne peuvent aller qu’au centre pour dépasser, la voie du centre est véritablement la voie principale, et la voie de gauche est véritablement une voie de dépassement. Résultat, une fluidité remarquable alors que jamais, en conditions normales, les trois voies ne se suivent à la même vitesse.

Quant à la palme du respect général? Elle revient au Japon. Je me souviens avoir été étonné de voir une suite de véhicules de quelques centaines de mètres et de ne voir personne tenter de s’y introduire ou de la couper.

Bref, il y a mieux et pire qu’au Québec. De grâce, essayons collectivement de respecter le code qu’on s’est donné pour assurer une conduite plus agréable et sécuritaire.

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