La Chevrolet Corvette figure parmi les voitures sportives les plus significatives de l'histoire de l’automobile américaine. Pas moins de huit générations du modèle ont été commercialisées depuis sa naissance, en 1953. Au fil des années, la Corvette a su s’adapter à une foule de bouleversements dans l’industrie de l’automobile.
L’un des moments les plus marquants de l'histoire de la Chevrolet Corvette remonte aux années 1970 où de nouvelles normes d’antipollution étranglaient les performances des voitures sportives américaines. Tout cela arrivait au moment même où la Corvette jouissait d’un succès commercial remarquable. Elle a d’ailleurs été la génération de Corvette la plus vendue et celle qui a perduré le plus longtemps.
Parce que l’année modèle 1979 a été la Corvette la plus vendue de toute l’histoire du modèle, nous trouvions important de la souligner dans sa variante L82.
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Histoire du modèle
Introduite en 1968, la Corvette de troisième génération - mieux connue par son nom de code C3 - était radicalement différente de sa devancière. Son design, beaucoup plus imposant et organique par ses courbes fluides et ses énormes ailes bombées, s’inspirait du concept Mako Shark dessiné à l’origine par Larry Shinoda.
Dès son arrivée sur le marché, elle s’est rapidement transformée en un succès commercial, tant pour le coupé que le cabriolet, lequel a disparu en 1975. Plus de 28 000 exemplaires de cette Corvette ont été produits la première année, ce qui constituait un record à l’époque. Cette génération a perduré jusqu’en 1982.
Au début des années 70, de nouvelles normes d’antipollution ont forcé tous les constructeurs d'automobiles à revoir leurs émissions de GES. La Corvette, comme tant d’autres voitures sportives américaines de l’époque, a perdu un bon pourcentage de sa puissance.
À titre d’exemple, en 1971, année où la Corvette avait atteint le summum de la performance, le modèle proposait une déclinaison développant une puissance de plus 400 chevaux. À compter de 1972, année où la SAE avait changé ses méthodes de mesure de puissance pour les moteurs thermiques, le maximum qu’offrait la Corvette était 250 chevaux à peine. Les choses ont empiré entre 1975 et 1977 où la C3 proposait les pires chiffres de sa génération en raison de l'ajout de nouveaux systèmes antipollution : 165 chevaux tirés d’un V8 de 5,7 litres (350 pouces cubes) !
C’est seulement à partir de 1978 que Chevrolet a commencé à s’adapter aux nouvelles exigences d’antipollution. Une augmentation incrémentielle en puissance a ainsi été observée, ce qui a permis de redonner un peu d’espoir aux amateurs du modèle en matière de performance.
Moteurs, transmissions et données techniques
Il s’agit ici d’une Corvette L82, en référence au moteur qui se cache sous son long capot. C’est une variante de haute performance du V8 que proposait la C3 de base. Ce moteur a été offert dans la Corvette jusqu’en 1980.
D’une cylindrée de 5,7 litres, il était installé à l’avant du véhicule. En 1979, année du deuxième choc pétrolier, grâce à quelques modifications supplémentaires, il avait atteint une puissance de 225 chevaux et un couple de 260 livres-pieds. Toutes les Corvette de cette génération étaient des propulsions. Les consommateurs pouvaient opter pour une boîte de vitesses manuelle à 4 rapports ou une automatique à 3 rapports.
La Corvette L82 de 1979 affichait tout de même des performances raisonnables. Bien que Chevrolet ne l’ait pas commercialisée comme une sportive, mais bien plutôt comme une voiture de grand tourisme, elle était tout de même capable de boucler le sprint de 0 à 100 kilomètres/heure en 6,6 secondes environ, ce qui demeurait rapide à l’époque.
Impressions de conduite
J’avoue avoir un faible pour la C3 en raison du fait que mon père était propriétaire d’une 1977 durant sa jeunesse. Il me raconte encore les histoires entourant sa Corvette peinte en bourgogne avec un intérieur en cuir blanc.
En la regardant stationnée aux côtés d’une C8 que j’avais à l’essai pour RPM, il était évident, par le design et les proportions de la C3, que la Corvette a fait du chemin en l’espace de 42 ans. La C3 est beaucoup plus petite et plus étroite que le modèle actuel. Et le fait que son moteur soit installé à l’avant fait en sorte que l’habitacle est poussé vers l’arrière du véhicule, contrairement à la C8 où l’on est assis à l’avant du bolide.
L’exemplaire à l’essai a reçu quelques modifications qui aident à rendre sa conduite plus agréable. Le propriétaire a d’abord retiré toutes les restrictions d’antipollution, ce qui permettait au moteur de développer les quelque 300 chevaux qu’il mérite. La suspension a également été remplacée par des éléments encore plus modernes – car la suspension d’origine d’une C3 n’est pas fameuse -, et le diamètre de braquage de la crémaillère a été raccourci, question de conférer à la voiture une conduite plus sportive. Le volant et les jantes ont également été remplacés. Enfin, la boîte automatique à trois rapports fut remplacée pour une boîte à quatre rapports.
Dès qu’on démarre le gros moteur thermique, on constate à quel point cette Corvette provient d’une époque qui n’existe plus. Ce V8 émet une profonde sonorité agricole qui envoie rapidement un coup de frissons dans le dos. Ça sent l’essence, et la finesse n’est aucunement de la partie.
La position de conduite dans une C3 est étrange, surtout si l’on est grand. Même si cette génération de Corvette offrait l’option d’un volant inclinable, celle-ci n’en était pas équipée. Il était donc difficile de prendre place à bord en raison d’un volant qui nous serre les jambes vers le bas. L’assise est également bizarre : on se sent tassé vers la gauche, et la portière nous enfonce l’épaule. Ce n’est pas très confortable.
Les modifications apportées permettent toutefois à cette C3 de démontrer un comportement routier étonnamment doux sur les routes abîmées du Québec. Le V8 n’est pas très puissant, mais le couple s’active très bas dans les tours, ce qui octroie néanmoins à cette belle d’autrefois de franches accélérations.
Cette Corvette n’a cependant rien de sophistiqué dans sa manière de livrer ses performances, même que sa nature vache et les délais de réaction de la boîte de vitesses nous coupent rapidement l’envie de nous énerver. Il s’agit en effet d’un véhicule axé sur le grand tourisme plutôt que sur la sportivité. Elle est belle, émets une belle sonorité, mais cette Corvette n’est aucunement une athlète dans les virages.
Outre des performances médiocres, j’ai tout de même ressenti un sentiment d’événement au volant de cette vieille sportive. Sa sonorité, le fait qu’on a les cheveux dans le vent en raison du toit en T, et les innombrables regards qui étaient fixés sur moi ont tous contribué à agrémenter l’expérience de conduite.
Comme toutes les générations qui l’ont succédée, la plus grande qualité de la Corvette de troisième génération est sa capacité à nous faire sentir comme une célébrité dès qu’on prend le volant.