Un phénomène fascinant entoure les modèles qui n’ont jamais été commercialisés chez nous. Ces véhicules font l’objet d’un engouement incroyable sur le marché de l’occasion simplement parce qu’on ne les a pas eus.
C’est le cas de la Ford Escort RS Cosworth 1996. Bien qu’il s’agisse grossièrement de l’ancêtre de la Ford Focus RS nord-américaine, elle se révèle clairement plus prisée par les amateurs d’anciennes voitures de performance. Revisitons-la pour comprendre pourquoi elle est si populaire.
Cet article est présenté par Hagerty Assurance
Histoire du modèle
Cette Escort a été commercialisée en Angleterre et en Europe entre 1992 et 1996 seulement. Dans la version RS Cosworth, elle était beaucoup plus performante que n’importe quelle voiture compacte que Ford commercialisait chez nous à l’époque.
Comme sa devancière, la Ford Sierra Cosworth, cette Escort avait été conçue pour performer en course automobile, plus précisément dans les catégories de rallye Groupe A et Groupe N de la FIA.
Elle était donc un véhicule d’homologation, c'est-à-dire que Ford devait en produire un certain nombre d’exemplaires pour lui permettre d’être admissible aux épreuves de course. Dans le cas de la catégorie Groupe A, la FIA exigeait plus de 2 500 exemplaires, tandis que dans la catégorie Groupe N, il en fallait plus de 5 000.
-
À LIRE AUSSI : Mazda RX-7 1993 : quand les ingénieurs décident
-
À LIRE AUSSI : Chevrolet Corvette L82 1979 : la vie après les restrictions
Pourquoi Ford n’a-t-elle pas simplement continué avec la Sierra ? Parce que, au début des années 1990, la Sierra approchait de la fin de son cycle de vie (1993 a été la dernière année de production). Le constructeur devait donc se tourner vers un autre modèle pour créer sa voiture de course. Ford avait aussi besoin de renouveau pour s’en prendre à une nouvelle offensive japonaise, notamment la Mitsubishi Lancer Evolution, la Subaru Impreza STI et la Toyota Celica GT-Four.
La légèreté et la taille compacte de l’Escort constituaient les éléments de base idéals pour construire un bolide de compétition. Cependant, l’Escort était une traction, et son moteur était installé transversalement, ce qui compliquait les choses pour les bienfaits des sports motorisés auxquels elle participait.
Tout comme sa devancière, l’Escort a donc été envoyée chez l’équipementier britannique Cosworth qui avait comme mandat de la convertir en voiture de course.
Cosworth, qui avait énormément d’expérience dans la conception et l’assemblage de moteurs pour les voitures de formule 1, s’est montrée à la hauteur de la tâche. Le spécialiste a carrément retiré les entrailles de l’Escort et les a remplacés par l’ancienne mécanique de la Sierra Cosworth, laquelle était installée longitudinalement.
Plusieurs altérations ont donc été apportées à la structure de l’Escort. À titre d’exemple, tout le panneau du plancher a été modifié. Les voies ont été élargies, ainsi que la carrosserie.
Moteurs, boîtes de vitesses et données techniques
Un seul moteur a officié sous le capot de cette Escort, soit un 4-cylindres turbocompressé de 2,0 litres qui développait une puissance de 224 chevaux et produisait un couple de 224 livres-pieds. Ce moteur était jumelé à une transmission intégrale qui acheminait la puissance au train arrière d’abord (répartition de couple 34/66) afin d’améliorer la tenue de route du bolide dans les virages. Seule une boîte de vitesses manuelle à 5 rapports n’était offerte.
Cependant, les modèles des années 1992 à 1994 étaient équipés d’un turbocompresseur de plus grande dimension, ce qui causait un délai de turbocompression plus long mais aussi une poussée de puissance et de couple beaucoup plus viscérale quand le turbo s’activait. Ces modèles étaient d’ailleurs plus faciles à modifier en raison de cette configuration.
Durant les deux dernières années de production de l’Escort RS Cosworth, Ford avait réduit les dimensions du turbocompresseur pour octroyer au véhicule une conduite plus civilisée au quotidien.
Dans les deux cas, l’auto demeurerait très rapide. Elle était capable de boucler le sprint de 0 à 96 kilomètres/heure en 5,7 secondes seulement, ce qui demeure performant même aujourd’hui.
Impressions de conduite
L’exemplaire à l’essai a été importé de France depuis l’Ontario, car il s’agit d’une voiture de 15 ans ou plus. Elle peut donc être importée, inspectée et immatriculée.
L’auto en question est équipée de quelques accessoires provenant du catalogue de pièces européen Wolf Cars, un système d’échappement, un système d’admission d’air, des amortisseurs et des jantes de 17 pouces de marque OZ, notamment.
L’habitacle d’une Escort RS Cosworth n’a rien de particulièrement excitant. Outre des sièges sport de marque Recaro et des cadrans de pression du turbo que Ford a installés sur la partie supérieure de la planche de bord, cet habitacle pourrait tout aussi bien être celui de n’importe quelle voiture compacte de l’époque. Seule la plaque Cosworth, installée du côté du siège passager, révèle qu’il s’agit d’une déclinaison spéciale.
Au démarrage, cette Escort émet une sonorité typique des sportives compactes mues par un moteur à 4 cylindres. C’est discret. Même qu’au ralenti, ce moteur se montre plutôt silencieux.
Après avoir enfoncé la pédale d’embrayage, qui était lourde comme une enclume, j’ai actionné le long et molasse levier de vitesses pour engager le premier rapport. À ma grande surprise, ce levier n’est aucunement précis, ni particulièrement agréable à manipuler. Il est carrément absent de sensations agréables. Conçue et assemblée par Ferguson, cette boîte de vitesses n’a d’ailleurs pas la réputation d’être très enivrante à utiliser.
Par chance, le reste du bolide est grandiose. Dès qu’on enfonce la pédale d’accélérateur, le petit moteur livre une dose assez remarquable de puissance et de couple. Il faut toutefois être patient, car rien n’arrive avant que le turbo ne s’active aux environs des 3 500 tours/minute. Mais une fois que toute la pression est livrée, la Cosworth devient absolument viscérale, et elle n’arrête pas de pousser jusqu’à son limiteur à 6 500 tours/minute.
En mouvement, l’Escort RS Cosworth n’est aucunement silencieuse. On entend la pression s’évacuer du turbocompresseur quand on relâche l’accélérateur et, sous notre siège, on entend toute sa mécanique, soit les différentiels et l’arbre de transmission. L’insonorisation de l’habitacle est mauvaise, mais pour les bienfaits de la cause, c’est agréable, car on entend la mécanique performer !
La tenue de route et la précision du châssis sont exceptionnelles, même que je ne m’attendais pas à conduire un véhicule de cette époque aussi précis dans sa façon de changer de direction. C’est là qu’on constate à quel point il s’agit d’une voiture de course pour la route.
À plein fouet, sur le circuit de course Sanair, j’avais un plaisir fou derrière cette légende née dans les stages de rallye. Et chaque fois que j’apercevais son énorme aileron typiquement nineties dans le rétroviseur, je ne pouvais m’empêcher de sourire en raison du plaisir que génère cette voiture.
On comprend maintenant pourquoi la Ford Escort RS Cosworth est si prisée par les collectionneurs. Ford a d’ailleurs tenté de reproduire ce charme avec la Focus RS, mais jamais elle n’a égalé la magie d’une Cossie.
POURRAIT VOUS INTÉRESSER
VIDÉO : Voitures de collection : le retour des années 80-90